Le retour du nucléaire au Japon…

Le retour du nucléaire au Japon va-t-il freiner la flambée des prix de l’énergie?

9 août 2015

AUTOUR DU MONDE – Malgré la catastrophe de Fukushima, en 2011, deux réacteurs de la centrale de Sendai, qui avait aussi été touchée par le tsunami, vont être redémarrés mardi.

Quatre ans après la catastrophe de Fukushima, le Japon se rebranche au nucléaire. Mardi, deux réacteurs de la centrale de Sendai, non loin du lieu de la catastrophe, vont être redémarrés, marquant la fin d’une diète énergétique forcée. Révélant les importantes failles de sécurité des centrales nippones, l’accident nucléaire avait provoqué leur arrêt total depuis 2013. Pour pallier cette absence brutale, Tokyo a dû surexploiter ses centrales à gaz, à charbon et à pétrole et augmenter ses importations d’énergie fossile. Une solution de secours payée au prix fort : la facture d’électricité a flambé de 20 % pour les particuliers et de 30% pour les entreprises. Le pays a rejeté 1,4 milliard de tonnes d’émissions de CO2 en 2013. Une double peine pour le Japon, cinquième plus gros émetteur au monde de gaz à effet de serre et dont le pouvoir d’achat stagne depuis des années.

Ce premier redémarrage à la centrale de Sendai marque la résurrection du nucléaire nippon. Troisième producteur mondial avant l’accident de Fukushima, derrière les États-Unis et la France, le Japon ne pouvait plus se priver de l’atome. Le gouvernement conservateur de Shinzo Abe subit la pression des compagnies d’électricité « qui ne veulent pas tirer un trait sur une source d’énergie dans laquelle elles ont massivement investi », explique Jean-Marie Bouissou, historien au Ceri (Centre de recherches internationales), installé au Japon. Le pouvoir vise les 20% d’énergie nucléaire d’ici à 2030, un peu en dessous des 28 % de l’avant-Fukushima. Le Premier ministre, Shinzo Abe, veut même relancer tous les réacteurs viables dans les deux ans.

Le nucléaire, « un choix par défaut »

Un objectif trop ambitieux? Chaque redémarrage réclame à la fois l’aval de la nouvelle Autorité de régulation nucléaire (ARN), créée en septembre 2012, et celui des collectivités locales. Or les délais des procédures de l’ARN sont très longs : quatorze mois d’enquête et de tests ont été nécessaires pour autoriser l’exploitation des réacteurs de Sendai. Sur les 56 réacteurs du pays, une dizaine, vétustes, seront démantelés.

Et d’autres ne pourraient jamais redémarrer, à cause de leur emplacement trop risqué ou du coût trop élevé des mises aux normes. Mais la prudence actuelle de l’Autorité est indispensable : « Avant Fukushima, les accidents dans les centrales étaient minimisés ou dissimulés. Aujourd’hui, l’opinion ne laissera plus passer cela », ajoute Jean-Marie Bouissou. L’opinion, justement, se montre peu enthousiaste. « Chaque dossier soulève une forte opposition au niveau local. Les élus ou les citoyens contestent les décisions administratives devant les juges », constate Carole Mathieu, chercheuse au centre énergie de l’Ifri (Institut français des relations internationales).

Pour la spécialiste en énergie, le nucléaire est « un choix par défaut. Le seul qui puisse garantir à la fois la stabilité des approvisionnements, la maîtrise des coûts et des émissions de CO2 ». Le pays du Soleil-Levant s’est justement engagé à réduire de 26% ses émissions de gaz à effet de serre et de porter à 24 % la part des énergies renouvelables. Un niveau atteignable, et qui permettrait au pays de redorer son blason à quelques mois de la COP21.

Ce contenu a été publié dans Japon 2015. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *