Fukushima: l’avenir des pêcheurs…

À Fukushima, l’avenir compromis des pêcheurs

  • À Onahama, le port le plus proche de la centrale, dix-huit entreprises sont toujours péniblement en activité, deux ont arrêté.À Onahama, le port le plus proche de la centrale, dix-huit entreprises sont toujours péniblement en activité, deux ont arrêté. | Johann Fleuri
Tokyo. De notre correspondante Johann Fleuri.

Six ans après le tsunami et l’accident nucléaire, les pêcheurs, plombés par les tests de mesures de radioactivité, survivent grâce aux compensations.

« Avant l’accident, je partais en mer vers minuit, se souvient Fumio Haga, 65 ans, pêcheur sur les côtes d’Iwaki, à une heure au sud de la centrale de Fukushima Dai-ichi. Nous lancions le filet quatre ou cinq fois dans la nuit. Nous rentrions au port vers 12 h pour que le poisson puisse partir en livraison pour le marché de Tokyo. »

Les courants qui longent les côtes de la région de Fukushima sont réputés pour abriter une grande variété de poissons comme la bonite, le mekihari, spécialité du bassin d’Iwaki ou l’hirame, un poisson plat, très raffiné.

Depuis mars 2011, dix espèces de poissons sont toujours interdites à la pêche « car elles sont particulièrement sensibles à la radioactivité », explique le pêcheur. Six ans après le tsunami et l’accident de Fukushima Dai-ichi, plus de 95 % des poissons testés sont sains, selon les chiffres officiels de 2016. Pour autant, la pêche locale n’a plus le même visage. « Maintenant, je ne pars plus que vers 3 h du matin, je sors le filet une fois et je rentre vers 7 h. Tous les poissons pêchés doivent passer par les tests avant de partir en livraison vers le marché domestique. »

« Le métier ne fait que décliner »

Le temps nécessaire à ces tests, qui garantissent la sécurité du poisson, anéantit l’activité de son entreprise. « Nous touchons des compensations de la part de Tepco (l’exploitant de la centrale N.D.L.R.) et du gouvernement pour les pertes générées. Mais bon, nous aurions préféré continuer à faire notre métier », regrette le pêcheur, amer.

Son coeur est brisé sous son grand sourire. « J’ai trois fils, je leur ai déconseillé de reprendre mon entreprise. Le métier ne fait que décliner. Je ne vois pas d’issues favorables à l’horizon. »

À Onahama, le port le plus proche de la centrale, dix-huit entreprises sont toujours péniblement en activité, deux ont arrêté. Yuichi Manome, grossiste, et Fumio Haga n’ont qu’une crainte : que le gouvernement et Tepco décident « de verser l’eau contaminée qu’ils continuent de stocker à la centrale, dans la mer, confie Yuichi Manome. On nous dit que cela ne craint rien, qu’il faut leur faire confiance. Mais la vérité est que l’on ne sait pas et on ne sera pas consultés si cette décision est prise. »

Lorsqu’en 2011, la centrale de Fukushima Dai-ichi a relâché de la radioactivité dans le Pacifique,« Tepco nous avait dit que cela ne ferait pas si mal à la faune et la flore… La vérité est que nos poissons ont souffert. Si cela devait recommencer, ce serait désastreux. » Yuichi Manome sait très bien que « dans la tête du consommateur, ce sera définitivement fini ».

Aujourd’hui déjà, « les pêcheurs des préfectures voisines restent le plus loin possible de nos côtes car ils ne veulent pas être étiquetés poisson de Fukushima. »

Ce contenu a été publié dans Japon 2017. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *