Fukushima mon amour…..

Fukushima mon amour – la critique du film

Le 23 janvier 2017

Une œuvre sensible et poétique, qui n’évite toutefois pas certains clichés symboliques.

L’argument : Marie, jeune allemande, arrive à Fukushima, au Japon, pour changer de vie. Malgré les difficultés d’adaptation qu’elle rencontre, elle choisit de rester auprès de Satomi, la dernière geisha de Fukushima qui a décidé, de son propre chef, de retourner dans la maison qui l’a vu naître. Les deux femmes ne pourraient être plus différentes, et pourtant, chacune à leur manière, apprennent à se découvrir et se lient d’amitié…

Notre avis : Marie est une femme blessée qui arrive dans une ville meurtrie. Les premières minutes narrent, sur un mode elliptique, la vie de cette Allemande dont la volonté est de renaître sous d’autres cieux. Que s’est-il passé ? On le devine plus qu’on ne le sait : une mariée est abandonnée en plein campagne par l’époux, elle se morfond, veut se pendre. Son corps gît à terre. Le plan suivant la montre dans le métro : Marie a rejoint le Japon. Elle se rend à Fukushima la maudite, ville hantée par le passé, comme un écho à sa propre existence. Elle y est accompagnée par le jovial Moshe, expert en tours de magie. Tous les deux vont être accueillis, pris en charge par une communauté d’autochtones dont les maisons ont été détruites par le tsunami de 2011. Moshe et Marie offrent un peu de divertissement en échange du gîte et du couvert : ils proposent un spectacle sur scène, initient la population au hoola-hoop. Mais Marie ne se convient pas dans cette posture, parce qu’elle a l’impression d’incarner une sorte d’occidentale arrogante venue au secours de pauvre gens. On comprend qu’elle renaîtra d’une autre manière, non pas en quittant ce pays, comme elle s’apprête à le faire sur un coup de tête, mais en investissant un lieu symbolique en compagnie d’une femme japonaise, Satomi, dont la situation est proche de la sienne.

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Copyright Mathias Bothor / Majestic

La maison de cette ancienne geisha a été littéralement éventrée par la catastrophe. Elle est livrée aux vents violents qui soufflent d’abord sur les deux femmes et leurs repas. Puis le lieu se reconfigure, on rafistole avec les moyens du bord, on fouille dans les décombres. Le film bifurque alors vers le récit initiatique : Satomi apprend à sa nouvelle amie les fondements d’un art de vivre à la japonaise, notamment la manière de se tenir à table et de prendre le thé en ne pensant à rien d’autre que sa tasse. Elle lui apprend également à chasser les fantômes du passé que Marie parvient à incarner, la nuit, lorsqu’elle s’aventure à proximité de la maison. Malheureusement, l’entêtement de la jeune femme, prisonnière de ses souvenirs, fait ressurgir la figure d’une ancienne protégée de Satomi, Yuki-chan, morte lors de la catastrophe, et qui incarne le poids d’une terrible culpabilité. Satomi sombre à son tour dans l’accablement.

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C’est le retour à la ville et à la vie qui permet aux deux jeunes femmes d’échapper à leur passé et de revenir, quelque temps plus tard, dans leur maison commune, apaisées, réconciliées avec elles-mêmes.
Cette oeuvre sensible, qui oscille entre le documentaire, la fiction et le clip est habillé d’un noir et blanc particulièrement esthétique. Mais elle n’évite pas toujours l’écueil d’un symbolisme naïf.

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