Il y a 5 ans, le 14 mars,

Il y a 5 ans, le 14 mars, j’ai écrit mon testament

15/3/2016
Mayumi MATUMURA

Il y a 5 ans, ce jour, j’ai envoyé mon testament à ma cousine par e-mail.

À partir du 2e jour depuis notre évacuation à Akôgi dans le district de Tsushima (dans là bourg de Namie), tout d’un coup on ne pouvait plus utiliser les outils de communication tels que téléphones mobile ou fixe.

Comme on avait encore l’électricité, on a su les explosion des réacteurs diffusées par la télévision.

Le 14 mars, le 3e jour d’évacuation, les voix se levaient en se demandant si la communication n’avait pas été rompue intentionnellement afin d’isoler les habitants de Namie dans ce lieu reculé dans la montagne et de nous y abandonner.

Quelqu’un a dit : « Il semble qu’on peut capter les ondes de téléphone mobile au village de Yamakiya près de la frontière communale. »

Arès avoir écrit le testament à ma cousine, j’y suis allée avec mon mari et ma sœur cadette.

Bien entendu, je n’ai pas parlé du testament à mon mari.

Après avoir vérifié qu’il y avait une faible quantité d’onde à la frontière communale, j’ai envoyé le mail.

« Nous avons évacué dans la montagne de Namie. Nous nous portons bien. Comment ça se passe de ton côté? Nous nous portons bien, mais dans les véhicules des forces d’autodéfense ou de la police, tout le monde porte un vêtement de protection tout blanc ainsi qu’un masque. Nous n’avons aucune idée de ce qui se passe.

Depuis hier, tout d’un coup on ne peut plus utiliser le téléphone mobile ou fixe. Peut-être nous sommes abandonnés et enfermés dans ce fond de montagne.

Je voudrais contacter ma mère et mon fils aîné, mais si je leur fais savoir tout cela, ils vont paniquer. C’est pour cela que je t’envoie ce mail. Les réacteurs explosent l’un après l’autre. Peut-être nous allons mourir ici. Si tu perds notre trace et ne peux plus prendre contacte avec nous, fais le suivre à ma mère et mon fils aîné. »

A l’épique, c’était mon fils aîné, étudiant universitaire à la ville de Kôriyama, qui s’occupait de ma mère.

En pleurant, dans le testament j’ai mis en mots ma gratitude auprès de mon frère cadet et de ma mère pour avoir formé une famille qui s’aimait. J’ai dit à ma mère de ne pas pleurer quoiqu’il arrivât puisque j’avais été heureuse. A mon fils aîné, qui était toujours gentil et n’épargnait pas d’effort, j’ai écrit qu’il était la source de ma fierté. J’ai dit à mes parents et mon frère cadet de vivre avec une volonté quoiqu’il arrivât.

J’ai écrit les mots de gratitude à ma cousine, et j’ai exprimé également mon grand déboire ne pas avoir pu évacuer mon second fils. En lui demandant de ne pas montrer le mail tout de suite à mon fils et les autres membres de famille, j’ai expédié le mail.

En fin de compte, les habitants évacués à Tsushima se sont déplacés plus loin, et nous avons pu évacuer à Nakadôri (la région du milieu du département de Fukushima) pendant la nuit. Mon testament est resté dans les téléphones mobiles, le mien et celui de ma cousine.

Je me trouve dans la cuisine. Je me souviens du jour, et cela m’a tourmentée.

Je ne souhaite à personne de vive une telle expérience.

C’est pour cela que je continue à lever la voix pour dire « Non au Nucléaire ».

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Publication datée du 14 mars 2016 dans le Facebook de Mme Mayumi MATUMURA, évacuée, originaire de la commune de Namie dans le département de Fukushima.

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