Fukushima: La politique énergétique du…

26 juillet 2015

La politique énergétique du gouvernement et l’opposition des citoyens

Texte de HORI Yasuo rédigé le 25 juin 2015
traduit de l’espéranto par Paul SIGNORET avec l’aide de Ginette MARTIN 

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  • Des réacteurs soumis à l’examen de l’Autorité Nucléaire de Régulation
  • Le tribunal de Fukui n’a pas approuvé la remise en marche de la centrale nucléaire de Takahama
  • Le tribunal de Kagoshima a approuvé la remise en route de la centrale nucléaire de Sendai
  • Cinq réacteurs vont être démantelés
  • L’électricité nucléaire est la moins chère !
  • Éruptions et séismes sont fréquents
  • 70% de  la population redoute la survenue de nouveaux accidents

 

-oOo-

 

La politique énergétique du gouvernement 

et l’opposition des citoyens

 

Au cours des trois derniers mois, ont eu lieu divers événements ayant trait à la politique énergétique du gouvernement et à l’opposition des citoyens. Ce sera le thème de mon rapport d’aujourd’hui.

 

Des réacteurs soumis à l’examen de l’Autorité Nucléaire de Régulation. 

La politique énergétique du gouvernement et l'opposition des citoyens

Le tribunal de Fukui n’a pas approuvé la remise en marche de la centrale nucléaire de Takahama

 

Le 14 avril, le tribunal de Fukui a interdit la remise en marche des réacteurs n° 3 et 4 de la centrale nucléaire de Takahama, dans le département de Fukui. Le verdict a été prononcé dans le cadre du “Processus provisoire”, dont le prononcé est immédiat, alors qu’un jugement ordinaire nécessite de nombreuses années avant la conclusion finale. La compagnie d’électricité Kansai est mécontente et exige l’annulation de ce verdict, mais elle devra patienter plusieurs années avant la décision définitive, et en attendant elle n’aura pas le droit d’utiliser ces réacteurs.

 

Le verdict précise que la nouvelle norme de sécurité de la centrale nucléaire, que le gouvernement a inscrite dans la loi après l’accident nucléaire de mars 2011, est tout à fait insuffisante, et donc que le fait que ces réacteurs soient conformes à la norme ne garantit nullement leur sécurité.

 

Ce verdict a porté un coup sérieux à la compagnie et au gouvernement. Il est encourageant et m’a réjoui.

 

Le tribunal de Kagoshima a approuvé la remise en route de la centrale nucléaire de Sendai

 

Le 22 avril le tribunal de Kagoshima a approuvé la remise en route des réacteurs n° 1 et 2 de la centrale nucléaire de Sendai. Il a aussi approuvé la nouvelle norme et a conclu que les réacteurs qui seront en conformité avec elle présenteront un niveau de dangerosité négligeable.

 

Ainsi, même après l’accident nucléaire de Fukushima, il se trouve encore un tribunal qui suit aveuglément le gouvernement. C’est vraiment une chose incroyable.

 

Cinq réacteurs vont être démantelés

 

Le 17 mars, deux compagnies d’électricité ont pris la décision de démanteler trois de leurs réacteurs et le 18 mars, deux autres compagnies ont décidé d’en démanteler deux. Ces décisions sont motivées par le fait que ces réacteurs sont anciens (entre 39 et 44 ans) et que leur capacité de production est faible (entre 360  et  560 milliers de kilowatts). Pour les mettre en conformité avec les nouvelles normes, les compagnies dépenseraient beaucoup d’argent et n’en retireraient aucun profit.

 

Pour mener à bien ce démantèlement, trente ans au moins seront nécessaires. Il ne peut être encore décidé ni où ni comment pourront être entreposés ou conservés les combustibles nucléaires et les déchets radioactifs qui seront retirés des bâtiments des réacteurs avant que ceux-ci ne soit démolis.

 

Le 30 avril, la compagnie d’électricité Kansai a sollicité un allongement de la durée de fonctionnement de deux de ses réacteurs, les numéros 1 et 2 de Takahama qui auront bientôt quarante ans d’âge. D’après les normes en vigueur, on peut obtenir une seule fois, une prolongation de vingt ans. Pendant les dix prochaines années, dix autres réacteurs dépasseront leurs quarante années de fonctionnement.

 

J’espère que l’Autorité de régulation nucléaire, qui examinera les réacteurs, ne donnera pas son feu vert à leur prolongation. Y a-t-il, autour de nous, des machines de quarante ou de soixante ans d’âge? C’est une folie de la part des compagnies que de considérer ces vieux réacteurs comme étant encore utilisables en toute sécurité.

 

L’électricité nucléaire est la moins chère !

 

Le ministère de l’économie et de l’industrie a publié son plan concernant les pourcentages prévus des sources d’énergie du Japon en 2030.

 

 

Source

2010 2013 2030
Énergie renouvelable 10% 11% 20%
Pétrole 7% 15% 5%
Gaz naturel 29% 43% 25%
Charbon 25% 30% 30%
Énergie atomique 29% 1% 20%

 

 

Avant l’accident nucléaire de Fukushima, le Japon dépendait de l’énergie nucléaire à hauteur de presque 30%, mais à présent toutes les centrales nucléaires sont à l’arrêt. Le gouvernement et les compagnies d’électricité nous ont effrayés en disant que, sans l’énergie nucléaire, le Japon allait revenir à l’époque féodale, or au cours de ces quatre dernières années il n’y a eu aucun problème. Notre économie progresse et les gens profitent de la vie. Nous n’avons donc nul besoin de l’énergie atomique et pourtant, comme les centrales nucléaires apporteront de grands profits aux politiciens et aux capitalistes avides d’argent, ceux-ci ont bien l’intention, de toute façon, de les remettre en route, et c’est pourquoi le ministère considère le nucléaire comme l’une des quatre sources majeures d’énergie.

 

Pour étayer son plan, le ministère a publié ses chiffres concernant le coût du kilowatt/ heure d’énergie fournie par les diverses sources :

 

Énergie atomique :         10,1 yens par kw/h

Charbon :                        12,3             »

Gaz naturel :                   13,4             »

Pétrole :                           28,9/41,6     »

Eau :                                11,0              »

Géothermie :                   19,2              »

Énergie éolienne :           13.9/21.9     »

Énergie solaire :              12,7/15,5      »

 

C’est vrai, le coût de l’électricité nucléaire est le meilleur marché ! Mais on a fait les calculs de façon très roublarde, en excluant certaines dépenses nécessaires. De plus on a, de façon ridicule, divisé par deux la fréquence probable d’accident gravissime, sous le prétexte qu’après Fukushima, les centrales nucléaires japonaises sont devenues plus sûres.

 

Pour l’accident de la centrale nucléaire de Fukushima, le gouvernement et TEPCO ont déjà dépensé et dépenseront encore d’énormes sommes se répartissant ainsi :

Indemnités :   5 421 milliards de yens

(54,21 milliards d’euros)

Dépollution :  2 500 milliards de yens

(25 milliards d’euros)

Construction de lieux de stockage pour matières nucléaires :

1 100 milliards de yens

(11 milliards d’euros)

Démantèlement des réacteurs et contre-mesures pour l’eau polluée

2 000 milliards de yens

(20 milliards d’euros)

 

Il m’est intolérable de voir estimer les dommages subis par les habitants en sommes d’argent. À présent, dans le département de Fukushima, cent mille, deux cent mille hommes vivent dans la tristesse et le désespoir. Comment pourrait-on chiffrer les pertes de vie subies ? Si l’on pouvait prendre en compte leurs souffrances, le coût de l’électricité d’origine nucléaire deviendrait incalculable. Pour vraiment consoler ces victimes, les choses les plus importantes sont de démanteler tous les réacteurs et de faire du Japon un pays sans énergie atomique.

 

Éruptions et séismes sont fréquents

La politique énergétique du gouvernement et l'opposition des citoyens

Des sismologues affirment qu’après un grand séisme il y a souvent des éruptions. Ils ont raison. Au Japon, dans la période actuelle, des éruptions se sont produites, se produisent et se produiront. En septembre 2014, il y a eu celle du mont Ontake, au cours de laquelle plus de soixante personnes ont trouvé la mort, en novembre celle du mont Aso, en janvier celle du mont Sakurajima, en mai ce fut le tour du mont Hakone, à la fin mai celui du mont Kuchinoerabu et tous les habitants ont évacué leur île, et en juin celui du mont Asama.

 

Le 30 mai, a eu lieu un séisme terrifiant, au tremblement lent et qui a duré longtemps. Il a pris naissance à 682 kilomètres de profondeur, dans l’Océan Pacifique, ce qui est inhabituel. Les sismologues ne comprennent pas ce qui a bien pu le provoquer.

 

L’archipel japonais est situé sur quatre plaques de la lithosphère, il est donc un vrai nid de séismes et d’éruptions. En cet endroit dangereux sont installés plus de cinquante réacteurs nucléaires. L’Autorité Nucléaire de Régulation elle-même, quoique travaillant selon la politique énergétique du gouvernement, n’a pas approuvé la remise en route des réacteurs Shiga et Tsuruga, en raison de deux failles actives se trouvant à proximité ou au-dessous d’eux.

 

70% de  la population redoute la survenue de nouveaux accidents

 

La crainte de beaucoup de Japonais face à de nouveaux accidents s’exprime ainsi :

 

1) Pensez-vous qu’un accident de même échelle que celui de Fukushima se reproduira?

 

Se reproduira certainement : 22%

Se reproduira peut-être : 52%

Ne se reproduira peut-être pas : 24%

Ne se reproduira sûrement pas : 1%

 

2) Les plans d’évacuation sont-ils préparés de façon suffisante ?

 

Tout à fait insuffisante : 37%

Insuffisante : 50%

 

3) Êtes-vous pour ou contre la remise en marche des centrales nucléaires ?

 

Tout à fait contre : 26%

Contre : 45%

Pour : 24%

Je la juge bienvenue : 4%

 

4) Sur la politique énergétique :

 

Pour la reprise actuelle et la réduction progressive du nombre de réacteurs : 53%

Pour le démantèlement immédiat de tous les réacteurs : 30%

Pour la reprise et le maintien du niveau actuel : 12%

 

(Selon une enquête menée auprès de 1 200 personnes âgées de 15 à 79 ans, en deux cents points de l’ensemble du pays, enquête faite en avril par le professeur Hirose Hirodata de l’Université Féminine de Tokyo.)

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