A Kashiwazaki, des murs anti-tsunami dans la plus grosse centrale au monde
Par Veronique Le Billon | 30/01 | 06:00Candidat au redémarrage de deux réacteurs, Tepco a dépensé près de 900 millions d’euros pour renforcer la sûreté du site.
Sur le mur de la salle de contrôle des réacteurs 6 et 7, une banderole le proclame : « Nous sommes la centrale qui a résisté à la catastrophe ! ». La catastrophe n’est pas celle du 11 mars 2011 qui a dévasté la centrale soeur de Fukushima-Daiichi, mais le séisme du 16 juillet 2007.
Installée au bord de la mer du Japon dans une forêt de pins maritimes, la centrale nucléaire de Kashiwazaki est la plus grande au monde, avec sept réacteurs d’une puissance totale de 8.200 méga-watts – tous à l’arrêt. D’une magnitude de 6,8, le séisme Niigataken avait touché certains équipements, mais il avait préservé les fonctions vitales de refroidissement et d’approvisionnement en électricité. La centrale est désormais la vitrine de Tepco, qui a déposé un dossier pour redémarrer ses deux plus gros réacteurs. « Après l’accident de Fukushima-Daiichi, nous avons eu des remords et des regrets qui se sont traduits par des mesures de sûreté », explique Katsuhiko Hayashi, le directeur adjoint de la centrale en charge de « l’acceptation publique ». La centrale de Kashiwazaki est située sur une faille sismique, dont Tepco assure au régulateur qu’elle est passive et non active, un critère qui fera toute la différence pour avoir le droit de redémarrer.
Pour protéger quatre de ses réacteurs construits seulement 5 mètres au-dessus du niveau de la mer, l’électricien a érigé un mur de 10 mètres de haut sur plus d’un kilomètre de long, élevé des murs et des portes blindées pour éviter les inondations, renforcé les armatures des cheminées, construit une digue pour retenir l’eau ou assurer le refroidissement en cas de tsunami, lorsque la mer se retire avant la grande vague.
Une approche plus globale
Sur le belvédère qui surplombe la centrale, un grand réservoir d’eau permettra aussi, en cas de rupture des circuits électriques, de refroidir les réacteurs par simple gravitation, une défense « passive » qui a manqué à Fukushima-Daiichi. Le centre de crise antisismique, lui, avait été construit juste après le séisme de 2007, les équipes n’ayant pu à l’époque accéder au bâtiment de crise. Sur un parking situé sur les hauteurs du site, une noria de camions stationne aussi, équipés de groupes électrogènes et chargés d’assurer un apport d’énergie en cas de panne de courant.
« En France, le « noyau dur » est un ensemble réduit d’équipements pour garantir les fonctions vitales de sûreté, dimensionné à un niveau plus élevé qu’aujourd’hui, alors qu’au Japon, l’approche est de renforcer globalement la centrale », explique Thierry Charles, directeur de la sûreté nucléaire à l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). A Kashiwazaki, ce renforcement de moyens a déjà coûté 120 milliards de yens (soit environ 860 millions d’euros), selon Katsuhiko Hayashi. Un montant qui interpelle, alors que trois des sept réacteurs sont à l’arrêt depuis 2007, et que les quatre autres avaient redémarré entre août 2010 et février 2011, un mois à peine avant l’accident de Fukushima.