Japon 2013 – Après le déluge/139

Japon : les détails de la nouvelle réglementation électronucléaire

L’agence de régulation électronucléaire Japonaise NRA ayant enfin défini les nouvelles règles de sécurité électronucléaires de l’ère post-Fukushima, ce sont 4 opérateurs Japonais qui pourraient présenter rapidement 12 dossiers de remise en service de réacteurs dans le courant de l’été. Les Réacteurs à Eau Pressurisée (REP) récents sont en effet nettement favorisés de par leur conception – légèrement – plus sûre, une donnée à laquelle s’ajoute généralement une période de mise en service plus récente. La limite d’âge de 40 années devrait également entrer en application le 8 juillet prochain, impliquant probablement la mort de nombres d’installations électronucléaires Japonaises vétustes du type Fukushima 1-3 [1] .

Des REP récents qui ne sont pas « absolument sûrs » mais juste « un peu » plus sûrs

Ces Réacteurs a Eau Pressurisée, généralement âgés de moins de trente ans, se voient accorder un délai maximum de cinq années pour s’équiper de filtres de dégazage du confinement primaire, un équipement rendu obligatoire par la nouvelle réglementation et qui est susceptible de – peut-être – retenir une partie des rejets radioactifs [2] lors d’une nouvelle catastrophe nucléaire ; ce délai de grâce n’est toutefois pas applicable aux Réacteurs à Eau Bouillante (REB) qui doivent de leur côté installer ces équipementspréalablement à leur dépôt de dossier de remise en service. Les coûts de ces équipements s’élevant à plusieurs dizaines de millions d’Euros, plusieurs électriciens Japonais – dont Tepco – se sont dits incapables de déterminer aujourd’hui s’ils étaient en mesure de financer ces travaux ou non.

Les Réacteurs à Eau Bouillante jugés « peu sûrs » par la nouvelle réglementation Japonaise

La nouvelle réglementation électronucléaire Japonaise – et c’est une première – estime que les REB (réacteurs de type « Fukushima ») disposent de confinements trop exigus qui imposent un dégazage précoce afin d’éviter le pire : une explosion du confinement ; ce défaut de conception peut entraîner une évolution très rapide de la situation accidentelle due à un accroissement très – trop – rapide de la pression au sein de l’enceinte de confinement du réacteur. Ces confinements étroits et bricolés (les tores de suppression situés hors de l’enceinte primaire) ont toujours représenté l’un des points faibles des REB et il est grand temps que le régulateur Japonais s’y intéresse de près !

Aucun réacteur ne pourra être construit sur une zone géologique « active »

Une simple mesure très logique mais dont certains opérateurs se sont nettement affranchis par le passé est rendue obligatoire : on ne construira plus de réacteur – en admettant qu’il s’en construise un jour – n’importe où au Japon. Cette interdiction s’applique non seulement aux réacteurs mais également à toutes les installations nucléaires comme des unités de recherche, de stockage ou de retraitement de combustible. Les exploitants désirant développer de nouvelles installations nucléaires devront effectuer des recherches géologiques approfondies et les joindre au dossier initial.

La notion de « faille active » étendue de 120.000 à 400.000 ans

Dans l’ancienne réglementation, une faille géologique était définie comme active [3] si cette dernière avait connu une activité dans une période géologique inférieure à 120.000 années ; la nouvelle réglementation porte cette durée à 400.000 ans. Il faut noter que d’autres études considèrent qu’une faille présente un caractère actif si elle a présenté une activité géologique remontant à moins de 1 à 3 millions d’années [4] ; cette augmentation de portée reste donc modérée et les opérateurs semblent ici s’en tirer relativement à bon compte.

Le problème des câbles inflammables enfin pris en compte

Les câbles reliant les équipement de mesure et de conduite du réacteur à la salle de contrôle-commandes’étant avérés partiellement inflammables au niveau des réacteurs les plus anciens, la nouvelle réglementation impose désormais le remplacement de ces câbles obsolètes, une opération coûteuse – à supposer que cette dernière s’avère techniquement réalisable.

Des câbles inflammables endommagés par un incendie à Browns Ferry(1) Des câbles de contrôle-commande endommagés par un incendie à HB Robinson (NRC )

Des mesures allant dans le bon sens qui impacteront théoriquement les anciens réacteurs

Ces travaux importants et extrêmement coûteux devraient modérer l’appétit de remise en service des unités électronucléaires qui n’auraient plus, compte tenu de la réduction théorique des autorisations de prolongation de service au-delà de 40 années, que quelques années à vivre. Les experts Japonais estiment ainsi que les opérateurs Japonais orienteront leurs financements afin de réaliser les travaux au niveau des unités les plus récentes, une manière de restreindre le parc nucléaire obsolète par « le marché », en quelque sorte. Vu de notre côté de la lorgnette, le régulateur Japonais semble s’appuyer ici sur une notion financière qui n’est pas la plus efficace qui soit car, dans un monde où les petits secrets des entreprises sont bien gardés et où l’argent coule à flots [5], ce qui est vu comme une contrainte par des technocrates ne le sera pas forcément vu par les entreprises concernées. Enfin, nous verrons bien…


Sources :  Utilities set to apply for screening of pressurized-water reactors under new safety rules (Mainaichi, 20613) – NRA makes new reactor safety regimen official  (Japan times, 20613)


Notes :

[1] Des Réacteurs à Eau Bouillante dont les mises en service ont été effectuées dans la période 1971 – 1976

[2] Les chambres de filtrage situées entre le confinement primaire et les cheminées ne retiennent pas tous les radionucléides et sont très limitées en capacité de filtrage ; elles s’avèrent incapables de retenir la totalité des quantités énormes de particules dégagées lors d’une fusion de cœur nucléaire et sont en outre globalement inefficaces pour filtrer les radionucléides s’échappant sous forme gazeuse (I-131, gaz rares, Tritium…)

[3] Une faille géologique est une fracture de l’écorce terrestre au niveau de laquelle des déplacements latéraux peuvent se produire ; une activité récente classera la fissure comme « active », à défaut cette dernière sera considérée comme « éteinte »

[4] L’ère quaternaire ayant débuté à -3 millions d’années (wiki )

[5] Nous pensons ici bien évidemment à la politique financière plus « qu’accommodante »  vis-à-vis des entreprises Japonaises, une opération soutenue à bout de bras par M. Abe qui vise a créer « du néant » une manne financière colossale autorisant un refinancement très – trop – facile des entreprises et des particuliers Japonais

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