Japon 2013 – Après le déluge/92

Tokyo le 3 avril:

Après Fukushima, Tokyo s’attaque au monopole des géants de l’électricité

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Le gouvernement japonais engage une grande refonte de son marché de l’électricité.
Tokyo veut contraindre les électriciens à séparer leurs activités de production, de transport et de vente de courant.

Le gouvernement japonais se donne cinq ans pour achever le projet de réforme du secteur de l’électricité. – Photo Bloomberg

Un peu plus de deux ans après la catastrophe de Fukushima, qui avait mis en lumière les dysfonctionnements du secteur de l’électricité dans l’Archipel, le gouvernement japonais a approuvé, hier, un spectaculaire projet de réforme de cette industrie.

Pour la première fois depuis 1951, Tokyo se propose de casser les monopoles régionaux des grands électriciens du pays, comme Tepco, l’opérateur de la centrale de Fukushima Daiichi, afin de permettre aux particuliers d’accéder à un marché libre et à des tarifs plus compétitifs. L’exécutif, qui espère faire adopter d’ici à juin au Parlement les premiers éléments de cette restructuration, se donne cinq ans pour achever ce grand chantier qui va susciter des résistances considérables.

Actuellement, dix électriciens se partagent le marché japonais. Contrôlant chacun un espace géographique déterminé, ils assurent dans leur zone la production, la transmission et la vente de courant à leur clientèle d’entreprises et de particuliers. Si le marché a été partiellement dérégulé depuis 1995 et que quelques grandes entreprises peuvent acheter leur électricité à des producteurs indépendants, comme Ennet Corp. ou Diamond Power, plus de 96 % des achats des gros consommateurs sont réalisés chez les dix électriciens régionaux. Le tout alors même que ceux-ci freinent l’essor des énergies renouvelables et pratiquent des prix élevés. Avant même la catastrophe nucléaire de mars 2011, les tarifs étaient au Japon 3 fois supérieurs à ceux proposés en Corée du Sud.

Pousser les prix vers le bas

Pour libéraliser ce système, le gouvernement veut forcer les électriciens à casser leurs structures et à dissocier légalement, d’ici à 2020, leurs différentes activités. A terme, Tokyo distribuera ainsi séparément des licences pour la production, la transmission ou la vente de courant. Le gouvernement espère que de nouveaux acteurs entreront sur chaque segment et permettront de pousser les prix vers le bas. Dès 2016, la vente aux particuliers devrait ainsi être ouverte à la compétition.

S’ils notent que la libéralisation du secteur de la transmission, réputé profitable, pourrait effectivement contribuer à une baisse des tarifs dans le pays, les experts sont plus dubitatifs sur le devenir du segment de la production, qui pèse actuellement sur les comptes des électriciens du pays.

Pour compenser la fermeture de la quasi-totalité des réacteurs nucléaires de l’Archipel, les différents groupes ont dopé la production de leurs centrales thermiques conventionnelles et ont augmenté leurs coûteuses importations de gaz naturel. Ces achats ont poussé les prix du courant à la hausse dans la plupart des régions. Si l’arrêt des centrales était maintenu et des démantèlements étaient ordonnés, le gouvernement pourrait dès lors se retrouver contraint de venir au secours des grands électriciens propulsés dans le rouge.

Yann Rousseau
Correspondant à Tokyo


 

 

Une faible part des énergies vertes

Pour développer les énergies vertes, le Japon a instauré l’été dernier de généreux tarifs d’achat de l’électricité d’origine renouvelable. L’éolien, le solaire et la géothermie n’assurent pour l’instant que 1,5 % de la production d’électricité du pays. La production à partir de sources nucléaires s’est par contre développée à la fin des années 1960 avant d’atteindre un pic en 1998. L’année 2011 a été marquée par une forte chute après la catastrophe de Fukushima.

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