Japon 2012 Apres le déluge/141

L’Isle le 29 août:

Fukushima : retour sur des débris anormalement radioactifs

Une dépêche AP datant du 27 août revient sur un passage doublement étonnant extrait de la conférence internationale traitant de « l’accident » de Fukushima ; cette réunion a débuté le 27 août au Quartier Général de l’AIEA à Vienne. Reprenons les déclarations attribuées à Shinichi Kuroki, directeur-adjoint de l’agence de sécurité Japonaise NISA retransmises par le canal d’Associated Press :

Les rejets de Césiums étaient évalués par Tepco à 10 MBq/h (1*10^7 Bq/h) en juin 2012

Soit M. Kuroki a fait une « petite » erreur d’unité, soit la retranscription de l’AP est incorrecte, il s’agit plus probablement de 0.01 GBq/h, ce qui est quasiment la même chose… à neuf zéros près !

Vous nous connaissez bien, faisant nous-mêmes parfois quelques erreurs d’interprétation, nous ne sommes par du genre à jeter ces quelques zéros à la figure de l’un ou de l’autre. Ceci dit, cette information, même si elle pourrait être présentée plus tard comme incorrecte, peut laisser à penser que les émissions de radionucléides et général et de Césium en particulier sont maîtrisées à Fukushima-Daiichi. Il n’en est rien, car, en fait, le Césium relâché rien que pour le mois de Juin 2012 par les ex-réacteurs éventrés correspond à une « autorisation de rejet » de 10 années de Césium qui sont tolérés pour une centrale française (1).

Le plus important : l’annonce sur la radioactivité Gamma très importante des débris radioactifs

Mis à part ce petit détail insignifiant, nous allons nous pencher de manière bien plus sérieuse et approfondie sur l’annonce d’une activité Gamma très importante au niveau des débris (béton et ferraille) qui jonchent le site de Fukushima-Daiichi.

M.Kuroki estime donc dans sa déclaration que le travail des « liquidateurs » de Fukushima-Daiichi serait gravement perturbé par le niveau élevé d’irradiation Gamma qui proviendrait des « décombres » (rubble) engendrés par l’accident.

Des décombres hautement radioactifs : pourquoi et comment ?

D’après le Littré, les « décombres » correspondent aux amas de matériaux brisés à la suite de la démolition d’un bâtiment. En y regardant de plus près, les matériaux utilisés dans une unité de production électronucléaire sont majoritairement (estimations tirées du dossier Quille de l’EPR):

1) Le béton : environ 300.000 tonnes pour la partie nucléaire (bâtiments, coffrages, confinements, radiers)

2) L’acier : environ 50.000 tonnes (cuves PCV et RPV, (2) tuyauteries, armatures de bâtiments, escaliers et passerelles d’accès…)

Problème : le béton comme l’acier ne peuvent théoriquement devenir irradiants !

Théoriquement, un matériau exposé à une irradiation ne peut lui même « s’activer » pour devenir lui même un émetteur radioactif que dans deux situations bien précises :

1) Dans le cas d’un environnement liquide (principalement le circuit RCP ou primaire d’un réacteur), le matériau peut se recouvrir d’une « peau »de contamination qui peut toutefois se décanter à l’aide de certaines techniques comme l’oxygénation ; l’action de la contamination en milieu « libre » (atmosphérique) est beaucoup moins documentée mais il semble toutefois très peu probable que de tels niveaux de contamination (1 SV/h) puissent être atteints autrement que dans un circuit fermé (recirculation d’eau ou d’air) au sein duquel les matériaux sont en contact permanent avec des concentrations importantes de radionucléides.

Les radioéléments contaminateurs du circuit primaire sont principalement des produits d’activation comme le Tritium (émetteur Béta pur). Les produits d’activation sont engendrés par l’irradiation neutronique dans le réacteur autrement dit l’exposition du fluide et des matériaux au phénomène de fission nucléaire qui engendre une quantité de neutrons importante.

Ces contaminants sont théoriquement contenus dans le circuit primaire et le confinement et ne devraient – théoriquement – pas être dispersés suite aux explosions de mars 2011.

2) Le rayonnement neutronique peut agir indirectement par l’intermédiaire de la contamination mais également de manière directe sur les matériaux qui y sont exposés : il fragilise les aciers irradiés par un phénomène de capture neutronique. Les aciers utilisés en zone nucléaire sont théoriquement compensés par une faible teneur en Cobalt qui est censé éviter ou limiter ce genre de réaction.

Il n’existe pas, à notre connaissance, de phénomène d’action de la radioactivité autre qu’une contamination particulaire sur des structures non métalliques et relativement neutres comme le béton ou les autres matériaux à base de granulats.

Le récent scandale des « bétons radioactifs » combattus par la CRIIRAD et d’autres associations concerne en fait des incorporations de matériaux contaminés dans des bétons destinés à la construction, une manière simple (pour les électriciens) et juteuse (pour les cimentiers) de se « débarrasser » des déchets de faible activité (TFA). Malgré l’avis défavorable émis par l’ASN en 2008, un arrêté datant du 5/5/2009 (3) a bel et bien autorisé un régime dérogatoire autorisant la réincorporation de déchets radioactifs de faible activité dans les produits de construction (et les biens de consommation courante).

Finalement, comment des « matériaux » fortement contaminés se retrouvent-ils à l’extérieur des installations ?

Nous n’entrevoyons qu’une seule réponse à cette énigme : des fragments de combustible, contenant des de produits de fission et d’activation ont été projetés sous forme particulaire lors de l’explosion du 14 mars 2011, qui a de plus en plus probablement dégradé au moins une fraction des assemblages de combustibles contenu dans le cœur, ou la piscine de désactivation, ou les deux.

Nous ne voyons aucune autre explication raisonnable à ce genre de déclaration informant que les travailleurs employés sur le chantier de Fukushima-Daiichi sont plus gênés par la contamination Gamma importante « fixée » sur des débris de bâtiments que par les produits de fission volatils, par ailleurs déjà assez redoutables pour la population mais assez bien maitrisés par les équipements du personnel affecté à la liquidation de la catastrophe.

Il est évident que si les particules fortement radioactives en question sont dispersées un peu partout sur le site et fixées sur l’ensemble des installations, ce phénomène ne va pas faciliter l’avancée des travaux sur le site de Fukushima-Daiichi car les protections légères des travailleurs n’agissent absolument pas sur l’irradiation Gamma, très « perforante ».

(1) (2) SFEN, 2011, par. 2.3, terme-source de rejets aérosols par réacteur et par an : 0.001 GBq

(2) Les 3 réacteurs qui ont explosé à Fukushima comportaient tous 2 cuves, l’une enfermant le cœur et l’autre servant de « peau interne » au confinement primaire

(3) Le Ministre de l’écologie concerné s’appelait alors Jean-Louis Borloo qui a bien d’autres d’autres décisions aussi « écologiques » à son crédit ; il est cosigné par les DIRCAB de Mmes Roselyne Bachelot et Christine Lagarde

Sources :

Gamma rays from Fuksuhima rubble worse than radioactive cesium, Japan Today, 28/8/12

Une traduction sommaire en Français sur TRT, 27/8/12 

Des rayons gamma plus dangereux que la radiation

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Les rayons gamma  provenant des décombres de Fukushima sont plus dangereux que les radiations. 

Les rayons gamma provenant des retombées radioactives des décombres de la centrale nucléaire de Fukushima au Japon, constitue un danger plus grave que les césiums émis par la centrale nucléaire endommagée.

 

D’après le rapport publié par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), le césium radioactif émis par la centrale nucléaire se propage à 0.01 becquerel par heure (le becquerel étant l’unité utilisée pour mesurer l’activité d’une source radioactive), soit en dessous du niveau de dangerosité.

 

Shinichi Kuroki qui a préparé ce rapport indique que l’essentiel est de parvenir à diminuer le niveau de radiation provenant du rayon gamma provenant des décombres de la centrale nucléaire de Fukushima.

 

La centrale nucléaire avait été touchée en mars 2011, par un séisme puis par un tsunami, endommageant le système de sécurité et permettant aux matières radioactives de se propager sur une grande superficie.

 

Le président de l’AIEA, Yukiya Amano avait appelé les membres de l’Agence à se réunir pour mettre sur table les mesures d’urgence à pratiquer.  

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