Japon 2012 Apres le déluge/192

L’Isle le 2 novembre:

Radioécologie : les champignons radio-stimulés, une extension de la menace radioactive ?

Dans les zones gravement contaminées par la radioactivité, les champignons semblent être en mesure d’utiliser l’énergie contenue dans les radionucléides dispersés pour croître et améliorer leur dissémination. Retour sur un phénomène très peu documenté mais bien réel.

1953 – Hiroshima-Nagasaki, une épidémie de Candidose attribuée aux explosions atomiques

La candidose est une mycose générée par de minuscules spores de champignon, le Candida. Dans le début des années 1950, 5 années après que les Américains aient fait usage de deux bombes thermonucléaires sur les populations d’Hiroshima et de Nagasaki, les médecins et les autorités sanitaires Japonaises ont commencé à reporter une maladie infectieuse qui semblait liée à l’accroissement de champignons dans les organismes des Japonais ayant été exposés à l’irradiation et ayant survécu jusque là.

Radioécologie : des champignons radio-stimulés, une menace pour l'humanité ?Un « Usnea Barbata » (barbe de Jupiter) colonisant une branche d’arbre

Des champignons dont le matériel génétique – élémentaire – aurait été modifié par l’irradiation ?

Les scientifiques Américains, contactés par leurs collègues Japonais inquiets du développement alarmant de ces nouvelles pathologies, furent tout d’abord plus que circonspects mais finirent par admettre, quelques années plus tard, que le noyau relativement primitif des Candida observées chez les patients étudiés semblait avoir subi une mutation génétique.

Les Candida sont des micro-organismes qui sont présents naturellement mais en quantité restreintes dans tous les fluides humains comme la salive, les fluides génitaux, ainsi que dans certains tissus comme les cellules muqueuses ou les épithéliums (estomac, intestin…). Sa prolifération ou sa mutation (sous forme filamenteuse par exemple) est à l’origine de son développement pathologique : la Candidose.

Candida Albicans, grossissement environ 100X

5000 cas documentés à la fin des années 1950

Les symptômes des patients présentant ces Candidoses étaient innombrables – ce qui a probablement retardé leur identification – : depuis les problèmes dermatologiques comme les allergies cutanées jusqu’aux atteintes systémiques plus sévères comme les problèmes endocriniens ou les effets sur le système digestif en passant par les effets asthéniques comme le célèbre bura-burala fatigue de l’atome.

La célèbre Mayo Clinic de New-York aurait ainsi récupéré les dossiers des patients et les échantillons prélevés à la fin des années 1950, ce qui lui aurait permis de comparer les souches Japonaises avec des souches plus anciennes du champignon et de valider les modifications génétiques de l’amibe étudiée. Nous utilisons volontairement un prudent conditionnel car les sources d’informations sont ici vraiment, vraiment peu nombreuses et fort peu académiques.

2002 – Tchernobyl, sarcophage de l’ex-réacteur n°. 4

Un robot envoyé en reconnaissance au sein du sarcophage rapporte des images étonnantes : nombre de surfaces situées sous la coque plus ou moins étanche semblent parasitées par un champignon / lichen et des moisissures dont certains échantillons sont prélevés.

Echantillon de Cladosporium Sphaerospermum prélevé à Tchernobyl

2006 – Faculté de Médecine Albert Einstein de New-York

Quelques années plus tard, le Dr. Arturo Casadevall, microbiologiste et immunologiste à l’AECM de New-York, intrigué par les compte-rendus effectués en Ukraine, s’appuie sur les analyses effectuées à Tchernobyl pour initier une étude sur les effets des radiations ionisantes (et de la chaleur) sur le développement des champignons Cladosporium sphaerospermum, l’espèce qui semblait proliférer sous le sarcophage de Tchernobyl 16 années après la catastrophe et dont l’extension se faisait systématiquement vers la source de radioactivité, phénomène indiquant un recherche probable des radionucléides par le champignon !

La colonie de champignons exposée à un débit de dose de 50 µSv/h (Gamma) durant une quinzaine de jours montra effectivement un accroissement de sa taille par rapport à la colonie-témoin non-irradiée. Il faut remarquer, arrivés à ce point, que les champignons étudiés, des hyphomycètes, ne possèdent pas de chlorophylle comme les plantes et qu’ils se « nourrissent » (tirent leur énergie) principalement du sucre ou d’autres matières organiques qu’ils peuvent trouver à proximité ; les colonies peuvent ainsi prospérer dans des lieux parfaitement obscurs comme au plus profond des entrailles, tant qu’ils ont accès à une source de glucides.

Développement comparé des colonies irradiées (rouge) et des colonies-témoin (bleu)

L’hypothèse émise par les scientifiques Américains serait non pas que les champignons se nourriraient directement de la radioactivité ambiante mais en tireraient plutôt une forme d’énergie secondaire qui serait synthétisée par l’intermédiaire de la mélamine qu’ils contiennent. On sait par ailleurs que les champignons concentrent fortement la radioactivité et il semble bien que ces organismes – pourtant élémentaires – aient trouvé là un artifice opportun permettant d’accroître leur développement et leur colonisation.

Un développement de la faculté de germination des champignons

Un second phénomène observé par les scientifiques dans une autre étudepubliée en 2009 réside dans la constatation que les spores émises par les champignons deviendraient plus mobiles au niveau du groupe exposé aux radiations ionisantes que ceux formant le groupe de contrôle.

Ce phénomène, assurément opportun pour le développement des colonies de champignons peut en revanche devenir un problème pour les espèces moins radiorésistantes car évidemment, les opportunes spores n’oublient pas d’emporter leur « casse-croûte » sous la forme de radionucléides pour les disperser parfois à des milliers de kilomètres de leur souche initiale par la voie aérienne mais également par la voie océanique.

Les champignons concentrent la radioactivité et y sont incroyablement résistants

En fait, les champignons sont extrêmement résistants à des environnements qui seraient incroyablement agressifs pour d’autres espèces : on en a retrouvé en très haute altitudedans les Stations Spatiales MIR et ISS , sous le sarcophage de Tchernobyl mais également dans le circuit primaire de réacteurs nucléaires intégrant cependant un beau bouillon de radionucléides !

Retour sur terre

Nous tirerons donc des études évoquées ci-dessus les enseignements suivants :

1) Les champignons étudiés sont très radiorésistants, ils tendent apparemment bien au contraire à prospérer en la présence de radioactivité

2) Ils peuvent voyager sur de très grandes distances en véhiculant ainsi des doses de radionucléides non négligeables

3) Dans leur état « normal », Ils sont à l’origine de tout un tas de pathologies parfois sévères comme les Candidoses systémiques ou certaines septicémies

4) Une éventuelle modification du matériel génétique des champignons irradiés étudiés est mal documentée mais les témoignages transmis par les rescapés de Fukushima, de Tchernobyl ainsi que ceux laissés par leurs soignants peuvent laisser entrevoir l’hypothèse raisonnable d’une relation directe entre des pathologies diverses et la multiplication, voire la modification génétique radio-induite des micro-organismes concernés.


Sources :

The Candida Story, Denie Hiestand

Le Candida Albicans, biocontact, 2009

Chernobyl Fungus Feeds on Radiation, scienceagogo (sic), 2007

Radiotrophic Fungus, wiki anglais

Ionizing Radiation Changes the Electronic Properties of Melanin and Enhances the Growth of Melanized FungiDadachova (AECM) et al., 2006, plosone (accès complet libre)

Ionizing Radiation: how fungi cope, adapt, and exploit with the help of melanin,Dadachova & Casadevall, NCBI, 2009

The influence of ionizing radiation on spore germination and emergent hyphal growth response reactions of microfungiTugay et al., NCBI, 2006

Radiation-eating fungi kill trees and kill people, bobby1, 14/11/12


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