L’Isle le 4 juillet: Après une période de silence nous voici revenu du coté de Fukushima et de ses informations sur la situation actuelle suite à la double catastrophe du 11 mars 2011
Les nouvelles du village nucléaire mondial
Les unités n°. 3 et 4 de la central dOhi au Japon
A Ohi, les choses ne se passent pas précisément comme le village nucléaire Japonais lavait envisagé : lunité n°. 3 devait se voir raccordée au réseau aujourdhui mais allez imaginer cela ? le matériel fait décidément de la résistance, la turbine principale a ainsi récemment rencontré des problèmes de vibrations retardant dautant la mise en production, même si le réacteur n°. 3 a bien re-divergé (1) dimanche matin.
Le redémarrage « officiel » de linstallation n°. 3 est maintenant fixé au jeudi 5 juillet, à moins que de nouveaux incidents / alarmes ne prolongent à nouveau ce délai. Une vingtaine dalarmes différentes ont en effet résonné depuis le 16 juin lors de cette opération de « redémarrage » de lunité n°. 3 dOhi, ce qui prouve bien que lénergie nucléaire est loin dêtre disponible instantanément et contrôlable à 100%.
Environ 700 manifestants barrent laccès au site dOhi le 1er juiillet 2012
Durant ce temps, les manifestations anti-nucléaires se poursuivent au Japon avec quelques centaines de manifestants qui ont bloqué dimanche la route dOsaka à Ohi, et un millier de personnes qui ont de nouveau manifesté contre le nucléaire dans le centre de Tokyo, 48 heures après la démonstration géante de vendredi ayant rassemblé 200.000 manifestants devant la résidence de M. Noda.
Apparemment indifférentes à ces réactions populaires locales ainsi quaux sondages qui établissent que plus de 70% des Japonais sont opposés au redémarrage précipité des réacteurs nucléaires du pays, les autorités Japonaises envisagent de redémarrer la tranche n°. 4 dOhi vers le 17 juillet ainsi que la très dangereuse unité de production de Kashiwazaki-Kariwa, exploitée par le sinistre opérateur TEPCO, au début de lannée 2013.
Pour conclure sur lépineux sujet dOhi, deux éminents professeurs de sismologie Japonais (3) ontrécemment averti que : « Le Japon était en train dignorer les leçons sécuritaires exprimées lannée dernière » en redescendant de plusieurs niveaux sur les beaux discours sécuritaires ayant suivi la catastrophe de Fukushima-Daiichi. Daprès les scientifiques, lindustrie électronucléaire continue de largement sous-estimer le risque sismique et les sismologues de la NISA semblent manifestement tout sauf neutres dans ce dossier.
Pendant ce temps, à Fukushima-Daiichi, la situation du refroidissement de la piscine n°. 4 reste précaire, lopérateur TEPCO ayant du finalement installer un nouvel équipement dalimentation électrique des unités de refroidissement, les unités mobiles primaire et secondaire (2) ayant refusé de fonctionner durant plus de 30 heures (3) ; la température de la piscine n°. 4 était alors passée de 33° à 43° C en une trentaine dheures soit une élévation de température denviron 0.33° / h.
1.33 µSv/h à Minamisoma, ex-zone « rouge » réouverte aux visites des ex-résidants
Sur le terrain de la contamination, une famille évacuée de Minamisoma raconte son calvaire et précise que : « La décontamination ne semble mener nulle part« . La famille est autorisée à retourner chez elle de manière provisoire (5), ce qui leur permet de malheureusement constater que les niveaux de radioactivité sont toujours extrêmement élevés, plus de 15 mois après laccident.
USA : au Japon (et ailleurs) les preuves de la contamination se trouvent dans les filtres à air
Les Japonais, ainsi que toutes les autres personnes ayant des doutes sur la contamination de la zone dans laquelle elles vivent / travaillent / se déplacent se trouvaient confrontées à lépineux problème suivant : comment vérifier la présence ou labsence de niveaux élevés de contamination radioactive dans leur habitation / bureau / voiture ?
Les différents filtres testés par KI4U
Jusquà très récemment encore, le problème navait pas de réponse : les autorités Japonaises vous envoyaient paître avec vos échantillons et faire analyser ces filtres par des sociétés privées était hors de prix.
Depuis peu, la société Américaine KI4U (6) offre lexpertise gratuite des filtres dhabitacle de voiture, de climatiseur fixe ou mobile et autres filtres HEPA Il suffit de cliquer dur le bouton « Get Tracking Code » en bas de cette page pour recevoir gratuitement un numéro dexpédition valable pour le transport de votre filtre vers les labos de KI4U et leur analyse radiologique. Les résultats vous parviendront généralement dans un délai de 7 jours après la réception du filtre.
BNs SAM940 « Defender »
Les filtres expédiés seront testés à laide dun SAM940 qui permet de détecter rapidement les niveaux de contamination et lanalyse des radionucléides éventuels retenus dans votre échantillon. Lappareil permet de détecter des concentrations anormales dIode-131, de Césium-137, de Plutonium-239, de Cobalt-60, de Potassium K-40 (pour étalonnage).
Si vous souhaitez que les filtres analysés vous soient retournés, KI4U vous demandera $10 pour la réexpédition.
Et si vous vous demandez : « mais pourquoi offrent-ils ce service ? » Nous répondrons que les gens de KI4U sont curieux de connaître la situation radiologique réelle des différents coins du monde, quils disposent du matériel, des équipes et du temps nécessaires et surtout, surtout, quils disposent de toute lindépendance nécessaire vis-à-vis du village nucléaire, ce qui nest pas monnaie courante dans le domaine très « verrouill頻 de lexpertise radiologique et dosimétrique.
Un exemple daffichage du SAM940
(1) Divergence : démarrage du réacteur suite au lancement de la réaction de fission nucléaire
(2) Équipements de refroidissement de secours, les installations principales ayant été endommagées durant la phase critique de laccident
(3) MM. Ishibashi de lUniversité de Kobé et Watanabe de lUniversité de Tokyo
(4) Du 30/6 à 0630 au 1er juillet à 1507
(5) La zone dOdaka, Minamisoma a été déplacée de « zone interdite » en « zone de visite autorisée » le 15 avril 2012
(6) KI4U ressemble à un indicatif radioamateur (Joe Green) mais signifie également Ki 4 U autrement dit : « Des pilules diodure de Potassium pour vous » ; les labos de KI4U sont établis au Texas, USA
juil02
Migration terminée
A part quelques soucis dans le transfert des images de Typepad qui utilise un format dimage propriétaire le transfert du blog sest bien déroulé ; il reste juste quelques petites erreurs 500 temporaires à gérer au niveau du serveur mais le plus gros est fait.
La cadence normale de création de billets reprendra demain après-midi.
Merci à tous pour votre soutien !
« Trifouillax » devenu « admin » sans le vouloir vraiment ![]()
juin30
Migration plateforme blog : Typepad > WordPress
Suite à de petits problèmes récurrents, votre blog préféré va migrer probablement ce weekend de la plateforme TypePad vers lunivers WordPress. Cela signifie plus de possibilités techniques, une richesse accrue dans bien des domaines mais également une facture un peu plus douce à la période annuelle critique de tout blog / site web : celle ou lanimateur contemple, pensif, la douloureuse du service de blogging
Si tout se passe comme prévu, rien ne sera perdu dans le transfert et tout sera transparent pour les utilisateurs. Comptez malgré tout sur quelques petits aléas techniques impondérables
A bientôt donc sur la plateforme WordPress
juin29
Une nouvelle démonstration anti-nucléaire à Tokyo voit le nombre de manifestants quadrupler en une semaine
Ils étaient 200.000 selon les organisateurs, soit environ 4 fois plus que la dernière manifestation du 22 juin, à manifester devant la résidence du Premier ministre Japonais. Le slogan de Saïkado hantaï (non au redémarrage) a de nouveau été puissamment et longuement scandé sur les trottoirs de la capitale Japonaise (1).
Malgré la présence remarquée dun très petit nombre de contre-manifestants, lénorme manifestation sopposant à la remise en service des réacteurs nucléaires Japonais arrêtés après laccident de Fukushima-Daiichi sest déroulée dans le calme, même si la fin du cortège a dû être stoppée suite à une certaine désorganisation des organisateurs et des autorités qui ne sattendaient pas à un tel succès : il est très délicat dempêcher une foule énorme de déborder des trottoirs sur lesquels cette dernière est censée se cantonner. Si la même manifestation sétait déroulée en France, les trottoirs auraient été vides et les chaussées pleines !
(1) Très disciplinés et policés, les Japonais défilent et protestent généralement sur lun des deux trottoirs et noccupent en principe jamais les lieux utilisés pour la circulation des véhicules
Sources :
Fukushima-diary, (1/2)29/6, anglais
Fukushima-diary, (2/2) 29/6, anglais
Citizenside, 22/6, français (première manif du 22/6)
juin29
Ohi : un problème peut en cacher un autre
Nous avions récemment relaté une alarme au niveau de lalternateur de lunité n°. 3 dOhi qui sétait déclenchée mardi 19/6 vers 10h. Trois nouveaux incidents ont été révélés en quelques heures par lopérateur KEPCO (Kansaï Electric).
Le 28 juin, un court-circuit dans une sous-station électrique
Il semble que de leau de pluie se soit frayée un chemin dans une salle de contrôle de production électrique ; un défaut détanchéité aurait ensuite permis à leau de ruisseler dans un boitier électrique de contrôle / commande. Cet incident très mineur parce quil sest produit dans une sous-installation non-nucléaire laisse toutefois perplexe sur létat et lentretien du site dOhi.
Le même jour, une alarme de défaut dalimentation électrique causée par une erreur de manipulation
Dans la foulée, Kepco a signalé quune alarme avait retenti en salle de contrôle / commande identifiant un problème électrique. Cette alarme aurait en fait été créée par un opérateur qui aurait accroché un interrupteur en voulant mettre sous tension un écran. Ici aussi, pas de conséquences mais la constatation que certaines commandes, après 40 années dutilisation, peuvent encore être peu ergonomiques et mal pensées.
Le 29 juin, alarme sur une pompe du circuit primaire
Une alarme signalant un défaut de pression / débit sur le condenseur de vapeur du circuit primaire a cette fois-ci impacté lunité n°4 ce matin vers 10h (Tokyo). Une surpression semble sêtre produite au niveau de la sortie de la pompe auxiliaire qui échantillonne le liquide de refroidissement afin de vérifier sa composition.
KEPCO pire que TEPCO ?
Daprès lanalyse dex-skf, les commerçants et industriels de la région de Kensaï sont réputés pour être très économes, au point de parfois jongler un peu avec les agendas des travaux de maintenance. De ce point de vue, lopérateur du site dOhi serait peut-être encore pire que TEPCO, ce qui est loin de rassurer les observateurs.
Sources :
juin28
Analyse et commentaires sur linvestigation menée par Tepco le 26 juin au niveau de la chambre de suppression 1F1
Le lieu concerné
La partie Ouest de salle de la chambre de suppression, au niveau 1 du bâtiment-réacteur n°. 1 de Fukushima-Daiichi.
1 Lemplacement approximatif de lintervention du 26/6
Plus précisément, daprès le document n°. 3, il semble que lopération a été menée à proximité du trou dhomme situé au Sud-Est du bâtiment visible sur une vidéo et des schémas plus anciens (unité 1F2).
2 Emplacement plus précis (daprès le document Tepco n°. 3)
La technique utilisée
Un endoscope composé dune caméra, dun thermomètre et dun radiamètre a été inséré depuis une conduite traversant le plancher du niveau 1 pour déboucher dans la partie Ouest de la salle contenant le tore de suppression.
3 point dinsertion du matériel et nivellement
4 Notez la passerelle (catwalk) qui fait le tour du tore
Les niveaux OP
OP (Océan Pacifique) : le niveau moyen de ce dernier, correspondant à environ 72 cm sous le niveau moyen de la baie de Tokyo. Tous les nivellements de Tepco sont basés sur cette référence. On notera que :
– Le haut du plancher du 1er étage est situé à OP10200 soit 10.2m au-dessus du niveau moyen du Pacifique et le bas à OP9550 ce qui nous permet de déduire que la dalle du plancher du 1er étage mesure 0.65m dépaisseur
– Le point le plus bas du BR1 (le radier) est situé à OP-1230 soit une hauteur hors-tout de la salle de 10.78m
– Le niveau deau dans la salle est situé à environ OP4000 soit 5.23m
– Le tore mesure environ 8m de hauteur pour 40 m de diamètre, les pipes de raccordement obliques vers le drywell mesurent quant à elles environ 2m de diamètre
Les hommes, les conditions de lintervention, la dosimétrie humaine
Nous estimons que Tepco a fait intervenir des travailleurs humains dans un contexte très difficile : forte radioactivité, humidité, chaleur Le fait que lopérateur ne communique pas, comme il en a lhabitude dans les compte-rendus, la composition de léquipe et les doses dirradiation des travailleurs concernés nous amène à estimer que ces derniers ont subi une irradiation importante. Au vu des niveaux repris ci-dessous, on peut facilement comprendre que les travailleurs ne pouvaient intervenir directement depuis la salle inférieure, la passerelle (catwalk) étant située au-dessus du niveau de leau stagnante mais dans une zone ou la radioactivité atteint plusieurs Sieverts par heure. Le plancher en béton de 65 cm permet ainsi aux travailleurs de nêtre exposés quà un débit de dose denviron 20 mSv/h, alors que le débit est 30 fois supérieur (0.62 Sv/h) juste au-dessous du plancher béton.
5 Les niveaux de débit de dose sur et sous le plancher du 1er étage
Lopération doit sêtre prolongée au moins une heure (40 minutes de film + la préparation) ce qui correspondrait donc, si les relevés de dosimétrie sont corrects, à une dose efficace denviron 20 mSv par intervenant.
La dosimétrie matérielle
Les relevés sont homogènement très élevés dans la partie aérienne du trajet (OP4000 à OP9550), le débit de dose maximal est obtenu a une profondeur denviron OP4200, cestà-dire juste au-dessus du niveau de leau stockée dans la chambre de suppression. La dose redescend ensuite sur environ 3 mètres avant de remonter, en fond de parcours, à des valeurs très trop élevées (plusieurs centaines de millions de Sieverts/h), que Tecpo estime dailleurs erronées.
6 Les niveaux de débit de dose par niveau OP
Le corium de lunité n°. 1 serait-il passé par là ?
En fait, le dosimètre semblait fonctionner correctement avant le niveau 12 aussi nous pensons quil aurait pu être endommagé au niveau inférieur de la salle de suppression, peut-être parce quil sest trouvé à proximité immédiate dune partie au moins du combustible fondu regroupé dans cette zone ? Il faut savoir que les dosimètres industriels, même sils sont très résistants aux radiations élevées, ne sont pas fait pour être approchés à proximité immédiate dune source irradiant un débit de dose supérieur à quelques centaines de Sieverts et ne pourront survivre à une dose cumulée denviron 1000 Sieverts.
Aurait-on localisé le pied déléphant de lunité n°. 1 ?
Les niveaux de dosimétrie relevés au cours de lopération du 26 juin sont nettement supérieurs à ceux relevés par exemple au même endroit de lunité n°. 2, qui ne dépassaient jamais 0.12 Sv/h et sétablissaient à 0.055Sv/h contre 1.5 Sv/h au même endroit (niveau de la passerelle 1F1). La dose est environ 30 fois supérieure au niveau de lunité n°. 1 ! Lhypothèse dun curium ayant percé le fond de la cuve du réacteur puis sétant échappé par gravité vers les pipes de lanneau de suppression avant de percer ledit anneau (très mince comparativement aux 2 cuves PCV et RPV) semble se confirmer. Il est également possible que le combustible en fusion se soit fragmenté pour séchapper du confinement primaire par plusieurs chemins différents (il y a 8 pipes transversales en tout).
7 Les relevés effectués par un robot sur la passerelle (catwalk) de lunité n°. 2 le 20 avril 2012
LUNITÉ N°1 DE FUKUSHIMA-DAIICHI EST CONSIDÉRÉE DEPUIS LONGTEMPS COMME CELLE DONT LE COMBUSTIBLE AURAIT ÉTÉ LE PLUS ENDOMMAGÉ, DU FAIT DE SON NIVEAU TECHNIQUE REMONTANT À 1970 (MARK1-BWR/3) ; IL EST GÉNÉRALEMENT ÉTABLI QUE LA PREMIÈRE FUSION DE CUR SEST PRODUITE À CE NIVEAU DÈS LE 12 MARS 2011 SOIT LE LENDEMAIN DU BLACKOUT STATION.
Analyse de la vidéo
Les images tournées sont de bonne qualité malgré les niveaux de doses très importants ; On observera avec attention :
(01:30) Aperçu de la rambarde de la passerelle surplombant le tore
(02:00) Le manipulateur positionne la caméra pour passer à lextérieur de la passerelle
(02:15) Cette panne déclairage de 30 secondes permet de bien visualiser les nombreux photons frappant le capteur de la caméra créant de jolis artéfacts de couleur
(05:30) Notez la corrosion omniprésente sur les surfaces métalliques
(07:15) Après bien des essais, le contournement de la rambarde de la passerelle est réussi !
(12:30) On aperçoit pour la première fois la surface de leau
(14:30) plongée, notez comme toutes les surfaces visibles se parent de rouge dès quelles sont immergées
(16:30) Des surfaces oxydées se décomposent complètement, sagit-il de lanneau lui-même ou dautre chose ?
(18:15) Idem pour ce plan, des surfaces vertes et rouges parfaitement irrégulières Cest étrange
(21:00) Plan parfaitement net, les surfaces rappellent presque des massifs de corail mais avec des éclats métalliques
(23:00) Le suivi devient délicat suite aux nombreuses particules en suspension dans leau, probablement engendrées par la manuvre de lendoscope
(27:35) Le moindre effleurement de ce qui semble être lanneau de suppression engendre le détachement de nombreuses particules
(30:00) Le radier en béton semble atteint ?
(35:00) Début de la remontée de lendoscope
(36:30) Surface !
(37:45) Ca coince un peu en remontant, le gars doit rager
Bravo aux manipulateurs, ce nétait pas évident !
Sources :
Résultats de linvestigation de la chambre du tore de suppression 1F1, Tepco, 26 juin (Document daccompagnement PDF)
Vidéo tournée lors de lintervention, Tepco, 26 juin, (zippée, 337 Mb)
Lire également :
Analyse et commentaires sur lendoscopie 1F2 du 20/1/12, gen4, 20/1/12
Analyse des photos et vidéos du tore de suppression 1F2, gen4, 20/4/12
juin27
Mizumoto, réflexions sur un hotspot
Suite à la publication dun billet sur ex-skf concernant le façonnage éventuel des points radioactifs par les services chargés de lentretien des parc urbains de Tokyo, nous voudrions corriger quelques points et émettre une autre hypothèse, hélas assez peu encourageante pour la suite des évènements de contamination au Japon.
Le curage des fossés, égouts et canalisations
Daprès le blog ex-skf citant une association, les services dentretien du parc concerné auraient régulièrement ôté les boues des égouts et des canalisations du parc afin déviter que le parking situé en contrebas ne soit inondé à la suite de fortes pluies. Ces boues auraient été répandues à certains endroits spécifiques du parc créant ainsi de nouveaux points de re-contamination de la radioactivité.
Léquation de base : la radioactivité ne peut être détruite, elle peut seulement être fragmentée
Nous ne pensons pas que les opérations récurrentes de curage aient particulièrement aggravé la situation radiologique du parc ; à notre avis, elles ont seulement participé à la redistribution de la contaminationen la rendant peut-être un peu plus apparente, ce qui aura au moins eu le mérite dattirer lattention sur létendue de la contamination de laccident, le parc étant situé à 220 km au Sud de lex-centrale de Fukushima-Daiichi. La vérité est que lensemble des districts Nord de Tokyo ont été assez sévèrement contaminés par les retombées accidentelles et que la dissémination de la contamination est toujours relativement inégale.
La délicate équation des boues en zone urbaine et périurbaine
Contrairement aux zones rurales (1), en zone urbanisée (2), les boues sont toujours formées par laccumulation de poussières de type urbaine qui sont, par définition, beaucoup plus mobiles que sur un sol naturel, autrement dit elles affichent un temps et une distance de voyage plus grands que sur un sol naturel. Les poussières sont donc brassées par le vent, les pluies, la neige (3) et tendent ainsi à toutes suivre le même chemin et donc a fabriquer les mêmes concentrations au niveau de la voirie. Imaginons un ensemble extrêmement urbanisé comme les faubourgs de Tokyo (parfois 5000 habitants au km2) : quels pourraient être les points de sortie éventuels de la contamination ?
– Une partie petite se fixera au sol (estimation grossière de 20 à 30% sur un sol bitumeux ou cimenté, à documenter)
– Le restant des boues (et donc de la radioactivité particulaire) suivra lécoulement des ruissèlements au prorata de leurs débits
Si lon place un parc de 100 hectares comme celui de Mizumoto au milieu dun gigantesque espace bétonné lentourant, le parc deviendra naturellement lun des points de fuite des boues urbaines (4). Pis encore, si les réseaux dassainissement sont saturés comme en cas de très fortes précipitations, les terrains restés naturels en zone urbaine deviendront les seuls points de sortie des lessivages des sols urbains Le sol naturel concentrera donc la contamination comme une éponge placée au milieu dun bac deau. Maintenant quune deuxième ou même que plusieurs phénomènes secondaires de re-concentration locaux brassent de nouveau la contamination au sein du parc lui-même nest pas impossible, il faut juste garder à lesprit que le parc ne serait initialement pas aussi touché sil était situé à la campagne !
Electronucléaire et urbanisme ne font pas bon ménage
Ne vous êtes-vous jamais demandé pourquoi les centrales nucléaires ne sont pas installées au cur des grandes agglomérations puisquelles sont aussi sûres ? La vérité est que les installations électronucléaires fuient toujours plus ou moins (5) et que leur implantation en zone urbaine, même si elle simplifierait énormément les problèmes de distribution et de transport de lénergie, provoquerait rapidement des phénomènes de concentration de radioactivité à un point ou à un autre. A la campagne, les installations fuient tout autant mais cela ne se voit pas trop Et si un accident majeur survient, cela laisse un petit délai pour déplacer des populations de toute façon moins nombreuses.
Un bon exemple de re-concentration à Mizumoto à la jonction du béton et de lherbe : 3.5µSv/h (source)
(1) Zones majoritairement en sol naturel, faiblement bétonnée
(2) Desservies par des réseaux (égouts), fortement bétonnées
(3) La neige est fréquente au Japon en saison hivernale
(4) En tenant évidemment compte de la déclivité du terrain
(5) Une certaine radioactivité est tolérée au niveau des installations nucléaires, il est en fait impossible de fixer des limites nulles ou trop faibles ; à noter que le vieillissement des installations aggrave généralement le débit de ces fuites
juin27
Discussion sur la vidéo de Chris Busby dite de Stockholm
Amis lecteurs, je vous invite à voir ou à revoir la vidéo suivante de lami Christopher Busby. Certes, cette dernière nest pas vraiment une nouveauté car elle a été enregistrée en septembre 2011 à Stockholm, mais je profite de son excellent sous-titrage en français (merci à Nordmendus) pour tenter de la diffuser auprès dune audience francophone la plus large possible.
Le Pr. Christopher Busby à propos de la
par Nordmendus
Voici les quelques questions qui me turlupinent après laudition des déclarations du narrateur au sujet desquelles jaimerai beaucoup obtenir vos avis :
1) (01:10 et 04:30) : Pensez-vous que la comparaison entre la contamination des filtres à air des voitures Japonaises et les poumons des enfants et des adultes Japonais soit judicieuse ?
2) (01:20) : Croyez-vous que les autorités Japonaises minimisent létendue et la gravité de la contamination, par exemple au moyen dexamens dosimétriques corps-entiers (WBC) minimisés ?
3) (02:00) Croyez-vous possible que les radio-nucléides comme les Césiums, le Strontium, puissent endommager le muscle cardiaque ?
4) (03:48) Estimez-vous opportun de baser les raisonnements de la contamination du sol et des habitants du Japon sur ceux relevés en Ukraine et en Biélorussie après la catastrophe de Tchernobyl ?
5) (04:38) Daprès vous, des organisations privées ou même des groupes de citoyens ont-ils les moyens deffectuer des campagnes de mesures de dosimétrie indépendantes au Japon ?
6) (06:00) Croyez-vous possible que le gouvernement Japonais dissémine volontairement la radioactivité sur tout le Japon (cest un fait avéré) afin de répartir le nombre de doses et donc déquilibrer préventivement la survenance de maladies radio-induites (cest une autre certitude même si son degré est encore inconnu) à travers lensemble du pays ?
7) (07:40) Jugez-vous la comparaison entre le blocage de la thyroïde par liode stable et celle de lADN par du Calcium ou du Magnésium judicieuse ? Si cest bien le cas, pourquoi ces pastilles très basiques ne figurent-elle pas dans les pharmacies au même titre que lIodure de Potassium ?
8) (08:05-08:15) Que pensez-vous de la proposition dassurer la commercialisation de produits par lorganisation Fondation C. Busby pour les enfants de Fukushima ? Pour info, le site aurait recueilli environ 750.000 Yens soit 7500 Euros à la fin 2011
9) (08:50) Idem pour les appareils de contrôle de la nourriture. A supposer que lopération soit envisageable, cela vous semble-t-il sur le fond une bonne idée de les distribuer aux parents Japonais ?
10) (09:20) Croyez-vous, comme le professeur Busby, que le gouvernement Japonais se désintéresse totalement de la situation des enfants de Fukushima, en supposant quils soient effectivement gravement menacés par la contamination et que le gouvernement Japonais possède cette information ?
Merci pour vos commentaires futurs, bien sûr vous pouvez répondre et débattre de tout point en particulier concernant cette vidéo même sil nest pas repris dans la liste présentée ci-dessus.
juin26
Alerte Japon : le parc de Mizumoto à Tokyo officiellement reconnu contaminé
Les autorités de Tokyo viennent de reconnaitre que le parc de Mizumoto, situé dans le quartier de Katsushika, au Nord de Tokyo et qui est lun des poumons de la mégalopole Japonaise, est contaminé dans au moins 9 endroits différents, qui présentent tous un débit de dose ambiante supérieur à 1µSv/h mesuré à 1 m du sol et sans tenir compte du bruit de fond ambiant.
Le parc de Mizumoto se développe sur 96 hectares et est lun des 150 lieux reportés comme contaminés dans les environs de Tokyo. Les officiels ont annoncé quau moins 9 hotspots du parc devront être décontaminés.
Il aura donc fallu plusieurs mois aux autorités de Tokyo pour reconnaitre officiellement ce que des sources indépendantes signalaient dès février 2012.
Le parc de Mizumoto, contaminé par Fukushima-Daiichi (Source : Nikkan Gendaï)
Source : NHK News, 25/6, anglais
Lire également : Après le parc de Mizumoto, larrondissement dEdogawa est également contaminé à la hauteur de la zone « rouge » de Tchernobyl, gen4, 02 mai 2012
EDIT (1845) Daprès ex-skf, le Parti Communiste Japonais aurait insisté pour que les autorités Tokyoites mesurassent une deuxième fois la radioactivité exactement aux mêmes endroits quune première campagne de mesures effectuées il y a 15 jours. A la grande surprise des autorités, le niveau de débit de dose relevé le 25 juin dépasse les premières mesures de radioactivité et surtout saffranchit maintenant des normes de décontamination pourtant très laxistes (1 µSv/h + BDF à 1 m du sol). Comme quoi le temps ne suffit pas à arranger les problèmes de contamination, bête qui se déplace, évolue et ne suit que fort modestement les injonctions et rodomontades officielles.
Nous reviendrons prochainement sur une explication possible des débits de dose constatés à plusieurs centaines de kilomètres du site de Fukushima-Daiichi et principalement les phénomènes de re-concentration de la contamination en zone urbaine et périurbaine. Concluons simplement ce billet en notant que les normes humaines concernant la radioactivité sont décidément de plus en plus floues, ou de moins en moins normées si vous voulez.
juin26
Regardez : des milliards de particules radioactives remises en circulation à Fukushima-Daiichi
Tepco accélère visiblement les travaux au niveau de lunité n°. 4.
Suite à la pression internationale qui sest doublée récemment dune prise de conscience nationale du risque induit par létat plus que précaire du bâtiment-réacteur n°. 4, Tepco a apparemment décidé daccélérer les travaux de dégagement des gravats afin dinstaller au plus vite le side-car sur la partie Sud de ce quil reste du BR4.
Une déformation du mur Ouest qui progresse manifestement
La mauvaise nouvelle a été communiquée hier par Tepco : selon lopérateur, la déformation qui avait été notée au niveau de langle Sud-Ouest du mur Ouest du BR4 a augmenté denviron 30% en lespace dun mois (46mm contre 33 le 25 mai).
Le point R6.5 est déformé de 46 mm vers lextérieur au niveau de létage n°. 3
Cette situation préoccupante est-elle en partie induite par les travaux de démolition des anciens niveaux 5 et 6 de lunité n°. 4 ? Le fait que Tepco ait fragilisé un peu plus la structure restante en installant une tôle de protection de 60 tonnes au-dessus de la SFP4 a-t-il une incidence sur cette déformation ?
Une tôle de protection de la SFP4 pesant 60 tonnes a été installée par Tepco le 15 juin 2012
Des travaux précipités : pourquoi ne pas tenter de récupérer les énormes quantités de particules radioactives remises en circulation par le tronçonnage du haut de lex-BR4 ?
Si la tente installée au niveau du bâtiment*réacteur n°. 1 avait été positionnée sur le BR4 avant le début des travaux visibles ci-dessus, une partie au moins des énormes quantités de particules remises en circulation par lopération aurait pu être filtrée Notez également la présence proche de travailleurs lors de la formation des nuages de poussières, pour ne pas dire au centre des nuages : pourquoi restent-ils là au lieu dattendre ailleurs, à labri des radiations, que les particules retombent et se stabilisent ?
Sources :
Lire également :
Experts Warn of another disaster awaiting at Fukushima, ABC News, 25/6, anglais
juin26
Les réfugiés du nucléaire, partie 2/2 : des gens, des terres, des animaux
Après avoir insisté dans le billet dhier sur les paroles dhommes et de femmes de lex-village dItate, évacués tardivement, mal dans leur peau, des êtres que les autorités entendent priver de sentiments, nous allons aujourdhui présenter à nos lecteurs quelques réflexions à la suite de lobservation de la seconde partie du petit film dIan Thomas Ash : Les habitants dItate, réfugiés du nucléaire, un an après.
(11:33) Ils nous ont même dit de ne pas sortir de nos maisons [en attendant lévacuation]
Une cultivatrice de riz désherbe préventivement sa rizière avant son évacuation car, précise-t-elle, sa parcelle risquerait dêtre envahie par les herbes folles. Ces gens espéraient pouvoir revenir, ils espéraient au moins un moment que lévacuation ne serait que temporaire. Cétait bien mal connaitre la radioactivité
(12:10) Je suis perdue Quest-ce quun Sievert peut bien signifier ?
Lendroit où je devais être évacuée a lui-même été évacué car il était trop radioactif Je dois maintenant trouver un autre lieu Il ny a plus une seule personne jeune ici pour me dire ce que je dois exactement faire.
(12:56) Une année plus tard, les herbes folles ont envahi la rizière
Quà bien pu devenir lagricultrice âgée ? Fait-elle partie des centaines de décès (principalement des personnes âgées) dans la région de Fukushima imputables à lévacuation, donc à laccident et des dizaines de milliers qui ont été plus ou moins atteintes dans leur chair, dans leurs tête par cette catastrophe ? Notre amie est peut-être malade, surement affaiblie par cette évacuation.
Comment rester impassible et neutre face à une telle détresse ? La catastrophe de Fukushima-Daiichi est décidément, des trois plaies qui ont touché le Japon au printemps 2011, celle qui laissera le plus de marques, le plus de souffrances ; le deuil sera impossible car lévacuation a tiré un trait rouge et brulant sur ce qui est le plus cher aux yeux de personnes dun certain âge : la terre, les habitations, les villages, les racines profondes de lhumanité.
(14:00) Jai voulu connaitre par moi-même le niveau de radioactivité [sur mes terres]
M. Katsuzo Shoji, exploitant agricole à Itate, était tout dabord incrédule : il a voulu vérifier par lui-même en juin 2011 le niveau de contamination de la terre quil exploite sur un carré de choux (1) quil a planté pour loccasion. Une année plus tard, la ferme de M. Shoji est abandonnée, le carré de choux également ; en fait, nous ne connaitrons probablement jamais le niveau de la contamination du dernier carré de choux de M. Shoji. Le bétail a quant à lui été abattu fin juin 2011.
Les compensations financières : 8670 Euros pour une vie ?
Amis lecteurs, si arrivés à ce point vous pensez que les Japonais évacués ont au moins bénéficié dune assistance financière convenable, vous vous fourrez le doigt dans lil : chaque adulte évacué na touché quune indemnité provisoire de 1 million de yens soit environ 9000 Euros.
Et enfin, comme promis, la réponse à notre test sur les Japonais encore évacués à ce jour
Cest un chiffre qui est très discrètement publié, peu commenté mais malgré tout extrêmement contesté et contestable : nous reprendrons les chiffres communiqués par lAsahi Shimbun fin novembre 2011 et repris dans un entrefilet de Courrier International daté du 2 décembre 2011 :
– NOMBRE TOTAL DÉVACUÉS SUITE À LA TRIPLE CATASTROPHE DE MARS 2011 : 330.000 (TOUTES PRÉFECTURES)
– ÉVACUATIONS LOCALISÉES DANS LA PRÉFECTURE DE FUKUSHIMA ET OFFICIELLEMENT IMPUTÉES À LA CATASTROPHE NUCLÉAIRE (2) : 153.000 HABITANTS DONT 93.000 RELOGÉS EN-DEHORS DE LA PRÉFECTURE DE FUKUSHIMA
153.000 ÉVACUÉS / RÉFUGIÉS, SOIT LA POPULATION DUNE VILLE FRANÇAISE COMME DIJON OU GRENOBLE ET EN GARDANT BIEN À LESPRIT QUE LE ZONAGE TEL QUIL A ÉTÉ EFFECTUÉ PAR LES JAPONAIS EST PLUTÔT RESTREINT : SI UNE VILLE COMME KORIYAMA, SITUÉE À PEINE QUELQUES KILOMÈTRES PLUS LOIN DE FUKUSHIMA-DAIICHI QUITATE DEVAIT FINALEMENT ÊTRE ÉVACUÉE, LE TOTAL AUGMENTERAIT DE 360.000 PERSONNES SOIT LÉQUIVALENT DE LA POPULATION DUNE VILLE COMME CELLE DE NICE.
(1) Les légumes à large feuilles étant très sensibles à la contamination par exemple aux Césiums, les particules radioactives pénétrant à la fois dans les feuilles mais également dans les racines par lintermédiaire du sol contaminé
(2) Evacués pouvant prétendre à une compensation financière de lopérateur Tepco au titre de la catastrophe nucléaire cf. http://www.gen4.fr/2012/01/politique-tepco-nationalis%C3%A9-tous-les-r%C3%A9acteurs-japonais-seront-hors-production-courant-avril-2012.html
Lire également : Weve no idea when well be back, Japan Focus, 11 mai 2011
juin25
Les réfugiés du nucléaire : Ce qui nous arrive est inimaginable !
Tout dabord, procédons à un petit test : selon vous, combien de Japonais sont encore actuellement concernés par le zonage de Fukushima-Daiichi ?
Nous vous communiquerons la réponse demain avec la seconde partie du billet. Donc, seriez-vous capable de donner à brule-pourpoint une estimation même très sommaire du nombre de Japonais qui ont été évacués suite à la catastrophe nucléaire de Fukushima-Daiichi et qui sont toujours relogés loin de leur habitation dorigine ? Pensez-vous quil soient encore 5000, 10.000, 25.000, 50.000, 75.000 ? Nous vous aidons un peu : le Japon est lun des pays du monde qui détient le record de la densité de population avec 340 habitants au Km2 en moyenne ; il faut savoir quen outre la population Japonaise se concentre beaucoup plus sur la côte Est où la densité atteint parfois 1500 habitants au km2 (1), comme dans la mégalopole Pacifique du Japon de lendroit, une mince bande de territoire de 30 km de large sur 1300 km de long sétendant de Fukuoka au Sud-Ouest au Nord du district de Kanto (Iwaki) en passant bien sûr par la baie de Tokyo.
La région touchée par la catastrophe affiche quant à elle une densité denviron 150 habitants au km2, comparable à celle dun département français moyennement peuplé comme celui de la Gironde ou du Vaucluse. Evidemment, les grandes agglomérations comme celle de Fukushima (300.000 habitants, 60 km au N/O de FD) et ou de Koriyama (340.000 habitants, 55 km à Louest de FD) auraient posédénormes problèmes dévacuation et de relocation si elles avaient du se voir concernées par des mesures de zonage étendues.
Trop tard, beaucoup trop tard
Les habitants de lagglomération dItate, petite ville de 6000 habitants située à 40 Km au Nord-Est de la centrale dévastée sont en colère : leur ville a été non seulement évacuée très tardivement (en mai/juin 2011), mais de manière peut-être encore plus nette que pour les évacuations initiales les maigres informations qui leurs ont été transmises par les autorités ne leur permettaient pas de se projeter dans léventualité dun retour.
Ils ont osé nous jurer que les centrales étaient absolument sures !
Ce qui est terrible cest quen France par exemple, à défaut déviter une telle catastrophe ou seulement avec des rodomontades, comme à Fukushima une opération de la taille de celle de lévacuation Japonaise aurait probablement induit un minimum de mesures daccompagnement : cellules daccompagnement, aides et soutiens psychologiques Mais au Japon, rien de tout ceci : les habitants sont traditionnellement censés être assez résistants pour endurer les pires situations sans broncherni se plaindre ; or, ces habitants déplacés ont malgré tout vécu des émotions et des souffrances quils nont pas été autorisés à extérioriser ; résultat : des problèmes psychologiques qui sadditionnent dorénavant aux problématiques de contamination
Une femme qui ne peut retenir ses sanglots : plus dune année après ce quil faut bien appeler une évacuation ratée (2), elle évoque la triple faillite de cette opération : psychologique, physique et financière. Initialement, les habitants dItate étaient situés bien au-delà de la zone dexclusion de 20 km, ils pensaient donc de la même manière erronée quils croyaient le site nucléaire sans danger nêtre absolument pas concernés par la radioactivité. Hélas, les frontières officielles de la contamination se sont avérées toutes aussi relatives que celles de 1986, les autorités ont donc du rétropédaler bien tardivement pour finir par ordonner lévacuation du village, plus de deux mois après sa contamination initiale. Cette évacuation a été achevée à la fin du mois de juin 2011.
Des habitants qui nont même pas été confinés durant plus de deux mois alors quil séjournaient dans une zone extrêmement contaminée : de 50 à 500 KBq/kg de radio-césium avec au moins deux zones à plus de 500 kBq/kg au Sud du village.
Certains habitants dItate sont néanmoins par obligation ou par dépit restés sur place
Le Kannushi (prêtre) du sanctuaire Shinto dItate arbore la tenue masculine Japonaise traditionnelle :hakama magnifiquement brodé (3) et do-gi (4). Malgré un sol fortement contaminé la mousse fait 8 ou 9 (µSv/h ?), le prêtre na pas quitté son sanctuaire dItate. Il évoque devant la caméra certaines autres personnes, très âgées, invalides, dépressives, qui ont fait comme lui et ont refusé de quitter leurs habitations. Ces réfugiés immobiles ont vu disparaitre autour deux les commerces, les administrations, les voisins, les amis les fidèles dans le cas de notre ami, qui nabandonnera pour autant pas son sanctuaire. Il fait partie des 30 dItate, 30 habitants qui resteront sur place, quoiquil arrive.
Les autorités nont pas communiqué les données de contamination disponibles par peur dune panique générale
De manière complètement irrationnelle, les autorités Japonaises nont initialement pas voulu prendre en compte la gravité réelle de la situation radiologique engendrée par la catastrophe de Fukushima-Daiichi en refusant par exemple dadmettre que la contamination sétait étendue bien au-delà du cercle imaginaire de 20 km tracé autour de la centrale. Ce détail est évoqué ouvertement par le prêtre : sils [les autorités] ne nous ont pas évacués alors que les niveaux [de radioactivité] étaient les plus élevés, alors pourquoi le faire maintenant [en juin 2011] ? tous les habitants sont en colère à cause du manque de communication.
Ils nous ont dit que ce nétait pas comme Tchernobyl, mais que va t-il arriver à ces enfants [irradiés] ?
Une autre habitante dItate pensait au moment de lévacuation aux enfants qui ont vécu deux mois dans cette zone, au milieu dune contamination et dune irradiation constantes : Mais que va t-il leur arriver ? demandait-elle alors.
Nous pourrons nous remettre du séisme et du tsunami
Cette déclaration du Kannushi dItate évoque bien la gravité de la crise nucléaire qui pourrait sembler a priori secondaire par rapport aux autres facettes de la catastrophe mais dont lacuité va saggraver au fil des années. Sans même évoquer une probable crise sanitaire à la Tchernobyl que la majorité des médias et la plupart des scientifiques tenteront probablement de minimiser le travail a déjà commencé il est évident que la situation des déplacés et des réfugiés immobiles va sérieusement se compliquer au fil des années.
Mon fils aurait du travailler ici, avec moi, mais il travaille maintenant dans un autre temple
Le prêtre pense aux effets à long terme que les radiations pourraient provoquer sur son fils aussi ce dernier ne lassiste plus dans les tâches journalières liées au sanctuaire ; notre ami évoque dailleurs en fin dentretien la pire des punitions du village : ceux qui ont un avenir ont fui Itate, et ceux qui y sont restés nen ont plus.
Le sanctuaire Shinto dItate
A suivre demain pour la seconde partie du reportage Les habitants dItate, une année après lévacuation.
(1) Hors la mégalopole Tokyoïte, 30 millions dhabitants, qui dénombre plus de 5000 habitants au km2 !
(2) Lévacuation dItate, effectuée en mai/juin 2011, a été le fruit dun revirement tardif du cabinet Japonais qui ne pouvait plus masquer davantage la situation dune contamination qui sétendait bien au-delà de la zone initiale de 20km
(3) Hakama : pantalon traditionnel ample destiné à masquer, à lépoque médiévale, les déplacements dun samouraï lors dun combat
(4) Gi, do-gi, keikogi, plus populairement kimono : haut de tenue en coton lourd et ample, destiné à faciliter le port de larmure des guerriers
Sources :
Les habitants dItate, un an plus tard, vidéo Youtube, Yann Thomas Ash, juin 2012, Japonais avec sous-titres anglais
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