L’Isle le 17 mai: La carte ci dessous n’est guère rassurante sur l’état de pollution radioactive sur le centre est du Japon
Japon : dosimétrie élevée confirmée dans la totalité du Centre-Est du Japon
Une dosimétrie « pondérée », Kesaco ?
La dosimétrie est une opération visant à relever des doses de radioactivité ou plus précisément des débits de dose radioactive (1) à des endroits donnés. Ces relevés peuvent être bruts ou pondérés, c’est-à-dire corrigés de facteurs divers : le temps (les « pics » s’aplatissant au fil du temps), les « cibles » envisagées (dose absorbée), le type de rayonnement examiné (Alpha, Bêta, Gamma, X-Ray… c’est-à-dire la « dose équivalente ») ou encore une pondération de la mesure réelle par la soustraction de la radioactivité dite « naturelle » (2) ; c’est ce dont nous allons nous préoccuper ci-dessous.
Un appareillage dosimétrique évolué
L’auteur des relevés présentés ci-dessous, que l’on peut supposer être un cheminot Japonais, a parcouru le Japon dans tous les sens équipé de son appareillage de mesure depuis le mois de juillet 2011. Notre ami n’utilise pas un « compteur geiger » grand public, souvent imprécis, peu sensible et peu endurant mais un appareil plus évolué : un dosimètre RAE2 fonctionnant à l’aide d’un double scintillateur à iodure de césium et détection par diode PIN.
Pas de détection Alpha et Bêta et un blindage exercé par les éléments environnant le capteur
Lappareil, ne mesurant que les photons, n’est donc pas adapté à la détection des rayonnements Alpha et Bêta ; ces rayonnements sont toutefois peu à très peu pénétrants aussi ils devraient être de toute manière stoppés par les parois des trains. Il en est de même, mais dans une moindre mesure, pour les rayonnements Gamma qui sont beaucoup plus pénétrants mais le « blindage » du train interfère toutefois probablement sur leur mesure. Il faut donc considérer ces dernières comme ce qu’elles sont réellement : une approche a minima de la radioactivité ambiante Gamma à 1m du sol environ, à une vitesse élevée, à travers le blindage exercé par la paroi inférieure du train, probablement assez épaisse.
Le travail de pondération sur carte
Notre ami a donc procédé durant de longs mois a des relevés de dosimétrie sur les rails mais ne se contente pas de livrer les résultats de manière brute : il s’est intéressé à tenter d’isoler, en quelque sorte, le bruit de fond antérieur à l’accident de Fukushima-Daiichi pour obtenir une mesure approximative « nette » des débits de dose induits par l’accident nucléaire. Contrairement à ce que l’on pourrait croire initialement (3), le Japon est généralement assez peu radioactif de manière « naturelle » avec environ de 0.03 à 0.15 µSv/h de bruit de fond.
Un tableau final plus qu’inquiétant
Compte tenu de tout ce qui précède, il est utile de préciser de nouveau que cette campagne de relevés ne mesure qu’une partie de la radioactivité ambiante mais est cependant une bonne base de travail d’autant plus intéressante qu’elle est effectuée de manière indépendante (4) et tend à valider d’autres campagnes de relevés effectuées par des associations ou des particuliers.
Globalement, le tiers Centre-Est de lîle de Honshu, de la banlieue Nord-Est de Tokyo (Katsuhika) jusqu’au Nord de Sendaï (Oshu) est affecté par des débits de dose supérieurs à 0.25 µSv/h « pondérés », soit une dose annuelle nette estimée à environ 2.2 mSv ; en rapprochant cette mesure du seuil de 1 mSv/an défini comme la limite d’exposition à la radioactivité artificielle du public, il est facile de s’apercevoir que les beaux discours dispensés par les autorités du Japon ne correspondent guère aux réglementations définies avant l’accident de Fukushima-Daiichi, ou comme nous aimons à le répéter aussi souvent que nous le pouvons, que les normes, dans ce domaine comme dans d’autres, ne sont établies arbitrairement que pour être détricotées au fil « d’improbables » événements qui finissent toujours par se déclencher tôt ou tard.
Dosimétrie estimée à 1m/sol et pondérée du bruit de fond « naturel »
(1) Nous ne sommes guère partisans de définitions scientifiques mais hélas ce jargon technique est ici indispensable ; vu la complexité du domaine, sans définitions précises, point de salut !
(2) Ce terme de « radioactivité naturelle » est un parfait oxymore car, depuis les premiers essais nucléaires réalisés dès 1945, on doit plutôt parler de bruit de fond « antérieur », donnée sensiblement modifiée depuis par les accidents nucléaires divers ; nous reviendrons sur ces données dans un prochain billet
(3) Les bombardements d’Hiroshima-Nagasaki ayant touché le Sud du Japon il y a 70 ans n’ont finalement que très peu modifié le bruit de fond radioactif actuel dans la moitié Nord du pays
(4) Les autorités du Japon ayant une fâcheuse tendance à minimiser par tous les moyens envisageables les relevés de radioactivité officiels