Japon 2012 Apres le déluge/116

L’Isle le 11 mai:

L’impossible équation de Fukushima-Daiichi, 14 mois après la catastrophe

Si Tepco baisse le débit, la température augmente ; si Tepco accroît le débit, la contamination augmente

La température relevés sur la partie inférieure de la cuve PCV de l’unité 1F3 de Fukushima-Daiichi vient de franchir, pour la première fois depuis le début de l’année, le palier de 60° C. L’opérateur n’a pas « optimisé » (1) le débit injecté depuis le 1er mars mais il est probable qu’il faille bien qu’il ouvre le robinet un peu plus assez prochainement.


(source : Tepco handouts, 2012)

Un pilotage qui s’apparente à un problème de baignoire de CM2

Autrement dit, comment l’opérateur doit-il s’y prendre pour limiter au maximum les débordements et fuites diverses tout en ne dépassant pas une limite fixe de température d’ex-confinement (2) ? S’il ouvre le robinet la température se stabilisera puis tendra à décroître mais le niveau d’eau augmentera en proportion ainsi que la contamination (3) ; s’il referme le robinet alors après un petit délai la température remontera progressivement,indice qu’au moins une partie du combustible se trouve toujours au niveau du confinement dans l’unité n°. 3.

La réponse liquide n’est pourtant pas la seule envisageable !

Depuis que l’opérateur et les autorités Japonaises se sont « enfermés » dans cette réponse, ils ne peuvent maintenant décemment plus reculer sans perdre la face et admettre que le problème était en fait bien plus complexe qu’il ne le semblait initialement. Les Japonais sont débordés de tous côtés : les sous-sols fuient en permanence vers l’océan, des travaux pharaoniques sont d’ailleurs prévus afin de tenter de limiter les dégâts créés jour après jour dans la mer ; côté piscines, la situation n’est guère plus réjouissante : la folie absolue consistant à placer ces dernières en partie supérieure de bâtiment démontre ici sa parfaite incohérence, à la fois dans les problèmes de circulation d’eau – encore des fuites – et de fragilisation des étages supérieurs par les explosions laissant craindre une « deuxième mi-temps » encore plus apocalyptique que la première.

Des projets alternatifs existaient et existent encore mais les Japonais sont prisonniers de leurs contradictions

Premièrement, l’énorme inventaire radioactif de Fukushima « pèse » probablement des milliers de fois celui d’une « petite » bombe « H » qui, intelligemment et rapidement utilisée, aurait permis de brûler – oui, d’éliminer par très haute température – une bonne partie de cet inventaire qui n’a pas fini d’empoisonner le Japon et, bien au-delà, le monde entier. Aujourd’hui, l’essentiel de l’inventaire radioactif en cœur est probablement « distribué » et ce qui reste « en réserve » le sera probablement au fil du temps.

Deuxièmement, si cette réponse peut encore sembler subjectivement disproportionnée même si elle ne l’est absolument pas sur le froid plan des faits, d’autres projets existent consistant par exemple à enfermer les confinements ainsi que les piscines dans des milieux solides aussi étanches que possibles aux radiations, selon le même principe que ce qui avait été utilisé lors de la catastrophe de Tchernobyl en 1986 (sable, argile, borax, dolomite, terre, plomb). Au-dessus, un ou plusieurs confinements « à la Novarka » (4) et puis du temps… beaucoup de temps !

Le problème de l’eau radioactive va persister pour des décennies

A défaut d’avoir pris à temps le taureau par les cornes, les Japonais vont prochainement faire la connaissance de tout ce qui a fait le charme de la région de Tchernobyl il y a une vingtaine d’années, la contamination des nappes phréatiques, d’énormes surfaces maritimes et le problème de la densité de population élevée au Japon en plus. A force de regarder ailleurs, la société Japonaise va finir par s’autodétruire ou migrer – pour ceux qui peuvent se le permettre – vers des lieux plus accueillants. L’apparition des premiers problèmes sanitaires importants provoquera une prise de conscience – bien tardive – que la radioactivité n’est effectivement pas dangereuse « dans l’immédiat », comme le répètent fort habilement les autorités Japonaises depuis le début de la crise nucléaire.

(1) Tepco ne dispose que de deux moyens d’action très limités sur la catastrophe : le débit d’eau injectée et le contrôle de « l’information »
(2) Donnée très subjective : les confinements sont au moins partiellement percés par le combustible donc au moins une partie ne s’y trouve plus ; dès lors, pourquoi se borner à estimer la température de ce dernier à un endroit où il n’a guère plus de chance de s’y trouver ?
(3) Par débordement de manière accidentelle mais également de manière permanente par des fuites et infiltrations

(4) Spin-Off Vinci-Bouygues prenant en charge sur le plan technique l’édification du sarcophage de Tchernobyl II



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