Japon 2012 Apres le déluge/104

L’Isle le 21 avril:  

Technique : FAQ sur le mystère du « hatch » 1F3

 Qu’est-ce que l’equipment hatch ? A quoi sert-il ?

L’equiment hatch est une espèce de tunnel d’environ 4m de diamètre et 2,5 m de longueur aménagé dans une des parois de « l’ampoule » en béton du confinement primaire ; ce couloir d’accès permet d’entrer et de sortir l’équipement lourd installé au niveau du pedestal, le support en béton qui soutient le réacteur nucléaire. L’accès à ce sas s’effectue au niveau du Nord du rez-de-chaussée du bâtiment-réacteur. Le couloir est verrouillé côté réacteur par un flange (porte étanche) et côté extérieur par un plug (bouchon en béton)

Qu’est-ce que le plug (bouchon) ? A quoi sert-il ?

Le plug n’est rien d’autre qu’un immense bouchon en béton, d’un diamètre quasiment identique à celui du hatch (4m) et de l’épaisseur du confinement (2m). La forme de ce bouchon est cylindrique alors que la partie extérieure peut être brute (ronde, à gauche : Browns Ferry) ou recouverte d’une armature rectangulaire (à droite, Fukushima 1F1). Son poids est estimé à environ 70 tonnes (Béton lourd armé, v=23 m3, p=3t/m3)

Qu’est-ce que le flange (porte étanche)? A quoi sert-il ?

Le flange est la porte étanche qui verrouille le hatch côté réacteuril s’agit d’un simple panneau étanche de forme convexe pivotant sur une charnière et verrouillé sur le sas à l ‘aide de 2 handle (verrous). Beaucoup moins robuste que le hatch, son épaisseur est d’environ 60mm d’alliage inoxydable de même type que celui de la cuve PCV (316 ?). Son poids est estimé à moins de cinq tonnes (v=0.75m3 à p=7T/m3).


Le bouchon est-il fixé / verrouillé sur le sas ?

Si la porte étanche côté réacteur est verrouillée par 2 loquets, le bouchon par lui-même ne semble pas l’être, il pourrait être simplement utilisé en blindage d’isolement à la radioactivité. L’étanchéité, compte des tenu des pressions relativement faibles circulant dans la cuve de confinement (Pservice=15 PSI contre plus de 2000 PSI dans le réacteur), pourrait alors simplement être assurée par le flange. Aucun système de verouillage n’est en tout cas visible sur la maigre documentation disponible sur cet équipement ; il reste à définir si un système de freinage ou de verrouillage n’existe pas au niveau des rails de guidage.

D’un autre côté, vu que la masse à déplacer est très élevée, selon la formule d’inertie F = M*A une accélération initiale relativement modeste pourrait probablement initier un déplacement de la masse de 70 tonnes. Nous parlons bien ici de déplacement engendré par une accélération horizontale du sol (séisme), pour l’étude sommaire du même effet induit par une surpression voir plus bas.

Le bouchon peut-il « sauter » si la porte étanche est intacte ?

A priori, cela semble impossible, seule une surpression violente ou importante vers l’extérieur du confinement semble pouvoir déplacer cette masse énorme ; si cette pression est atteinte au niveau du bouchon alors la porte étanche ne l’est forcément plus. La seule alternative pourrait être qu’il se soit trouvé déplacé par le séisme du 11 mars 2011 mais nous ne souscrivons guère à cette hypothèse, l’intensité des secousses horizontales ayant été relativement modérée au niveau de Fukushima-Daiichi le 11 mars 2011 (550 Gal soit 0.6 G, source world-nuclear). Les centrales Japonaises sont censées résister à des accélérations allant jusqu’à plus de 2000 Gal, le bouchon est donc prévu pour ne pas s’ouvrir à la moindre secousse et c’est heureux !

Quelle est la pression minimale nécessaire pour faire reculer cette masse de plusieurs mètres ? 

Le fait que le bouchon se déplace sur des rails, sûrement à l’aide de petites roues, facilité certes son déplacement horizontal mais nous estimons que s’il n’existe effectivement pas de système de verrouillage de ce bouchon de 70 tonnes autre que la simple gravité, une force horizontale (pression) relativement modeste pourrait à la rigueur suffire à l’entrebâiller, mais sur 2 mètres de portée, c’est une autre affaire : dès que le sas est entrouvert, une surpression modérée n’y suffira plus, à moins d’une surpression extrêmement brève et violente (explosive). Nous devons bien avouer que nous manquons une fois de plus bien cruellement d’informations.


Un précédent est-il documenté ?

Nous n’avons, malgré nos recherches prolongées, pas trouvé de documentation renseignant un quelconque accident de ce type ; il devrait théoriquement l’être, l’événement pouvant être considéré comme une rupture de confinement primaire donc obligatoirement classé dans la catégorie INES 5 et supérieure (TMI, Winscale).

Pourquoi l’opérateur a-t-il autant retardé la diffusion de cette information ?

Premièrement, nous ferons remarquer que Tepco n’a pas officiellement déclaré cette perte de confinement, il s’est juste contenté d’évoquer qu‘il avait constaté (depuis longtemps) une « crevasse » sur le côté du bouchonqu’il allait « étudier attentivement » (refrain habituel). Ne n’avons lu nulle part que le bouchon avait reculé de manière importante ! Lors de la conférence de presse, personne n’a réagi à l’information, merci au travail de surinformation effectué ces derniers jours par exemple sur la page de news de l’opérateur, le signalement concurrent que le tore de l’unité 1F2 a été contrôlé, d’autres mesures de radioactivité etc.
C’est un excellent travail de désinformation ou plutôt de manipulation de l’information. Et le pire, c’est que ça a l’air de fonctionner… Le week-end, les élections en France, la situation internationale tendue, on ne pouvait rêver meilleur moment pour faire une annonce sans la faire vraiment !

Alerte Fukushima : le déconfinement primaire de l’unité 1F3 avoué implicitement par Tepco 6 mois après sa découverte

 Tepco continue a révéler des découvertes, pourtant anciennes, au compte-gouttes !

Bon, encore un mauvais point pour la prétendue « transparence » des informations nous provenant de Tepco : le 14 novembre 2011, Tepco avait relevé avec l’un de ses premiers robots « Packbot » un débit de dose de 1.6 Sv/h au Nord-Est du niveau 1F3. Ce que l’opérateur avait juste oublié de signaler, c’est que l’intervention s’était déroulée au niveau du equipment hatch du confinement, autrement dit d’un gigantesque « bouchon » en béton qui verrouille l’accès à l’intérieur de l’ampoule en béton du confinement et qu’il s’était visiblement rendu compte que quelque chose d’important s’était passé à ce niveau lors de cette inspection.

Un problème majeur découvert le 14 novembre 2011 et « révélé » le 19 avril 2012

Le bouchon (plug) a manifestement reculé et un espace (crevice = crevasse, fente notez l’euphémisme sur le document Tepco) est nettement visible sur la partie droite du hatch. Notez sur le schéma ci-dessus que le bouchon doit effleurer en position fermée le renforcement du confinement, or sur la photo il semble avoir reculé d’au moins 2 mètres ! Sur la droite du schéma, il est possible de visualiser qu’un autre bouchon ferme le sas au niveau de la cuve PCV. Or il est évident que, si le bouchon extérieur a « sauté », le bouchon intérieur, beaucoup plus léger, a du également souffrir.


Le bouchon intérieur du sas, en inox uniquement
La taille des travailleurs donne l’échelle (METI)

Ce document n’est rien d’autre que la preuve visuelle de la perte du confinement primaire de l’unité 1F3 !

Eh oui, nous parlons bien ici du confinement primaire de l’unité 1F3, celui que l’opérateur et le gouvernement Japonais, dans un élan de solidarité touchant, ont affirmé pendant plus de 6 mois être ab-so-lu-ment intact ! Ce sas permet de déverrouiller le confinement afin d’y introduire ou d’en retirer du matériel lourd. Le bouchon extérieur pèse environ 70 tonnes et il recule d’environ 5 à 6 mètres sur 2 rails pour permettre de manœuvrer l’équipement lourd entrant ou sortant. C’est précisément au niveau de ces rails que Tepco avait indiqué avoir relevé une dose de 1.6 Sv/h en novembre 2011.

Le « cosmétique » révélé en urgence, l’information importante « mentionnée » 6 mois après

Un honorable lecteur nous faisait récemment remarquer que, décidément, nous exagérions en accusant fréquemment l’opérateur de faire beaucoup de cinéma pour finalement très peu communiquer les informations intéressantes et importantes. En voila une excellente démonstration : En novembre 2011, Tepco a passé beaucoup de temps à communiquer sur une opération « serpillière » tout en n’informant pas le public et les médias de sa découverte majeure : le dé-confinement constaté de visu sur le hatch de l’unité 1F3.


Le sas d’équipement de Browns Ferry en position « fermé »
(Les hatch de Fuku sont a priori de forme carrée)

 


Le même en position « ouvert », le bouchon mesure environ 5 m de diamètre pour plus de 2 m d’épaisseur
Son poids est probablement de plusieurs dizaines de tonnes

Le sas de Fukushima 1F1 en avril 2011 (?)

Hypothèse : pourquoi Tepco limite le débit d’eau injectée

Si Tepco « pompait » plus dans le confinement 1F3, l’eau pourrait alors atteindre alors le niveau du (des ?) sas d’équipement endommagés ; en conséquence le niveau 1F (rez-de-chaussée) serait peut-être de nouveau inondé, ce qui empêcherait toute progression du travail à cet étage. Les robots sont courageux, peu sensibles à des irradiations importantes mais ils ne sont pas étanches…


Le niveau du / des sas d’équipement, en bleu (METI)

Sources :

Tepco, 20/4, anglais pour la technique
Tepco, 22/11/2011 pour le premier rapport ne mentionnant pas la constatation
Equipment hatch repair robot, METI, 15 mars, anglais
ex-skf, 20/4, anglais pour les commentaires

crédit photos sas : Physics-Forum



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